L’écrivain Philippe Besson en mai 2017, à Paris. / JOEL SAGET / AFP

La nomination de l’écrivain Philippe Besson, proche d’Emmanuel Macron, comme consul général à Los Angeles, continue de faire des vagues au Quai d’Orsay où nombre de diplomates s’irritent « de ce fait du prince ». La CFDT-MAE, le plus important syndicat du ministère des affaires étrangères (40 % des voix aux élections professionnelles), va déposer un recours devant le Conseil d’Etat pour annuler le décret du 3 août modifiant les règles concernant la nomination d’un certain nombre « d’emplois supérieurs » dont 22 postes de consuls généraux. Le chef de l’Etat pouvait déjà nommer à sa discrétion des ambassadeurs, qu’ils soient ou non fonctionnaires. Il en sera de même désormais pour les responsables de ces postes. La CFTC va aussi déposer un recours contre un texte jugé « bricolé et arbitraire ».

Parmi les postes concernés, il y a le consulat de Los Angeles, convoité par l’écrivain auteur notamment de Un personnage de roman (Julliard, 2017), récit largement hagiographique de la victorieuse campagne du leader des « marcheurs ». Le décret de sa nomination n’a pas encore été publié mais celle-ci a été confirmée par l’Elysée. Emmanuel Macron, en marge de son voyage au Danemark et en Finlande, a récusé toute accusation de « copinage », affirmant « vouloir ouvrir l’ensemble des postes de responsabilité de l’administration, en particulier de la haute fonction publique, à des gens de talent et de mérite venant d’autres horizons, encore davantage qu’on ne l’a fait jusqu’ici ».

Les 22 postes de Consul général mentionnés sont pour le moins hétéroclites, même s’ils sont tous prestigieux. Certains, comme Québec et Jérusalem – auprès de l’Autorité palestinienne – sont une quasi ambassade et totalement politiques. D’autres sont très sensibles en raison de l’actualité comme Istanbul, Dubaï, Erbil ou Barcelone. En revanche, Boston, Edimbourg et Kyoto sont des consulats « d’influence », surtout honorifiques. Ce qui n’est pas le cas de Los Angeles, chargé de la gestion des activités économiques, culturelles et scientifiques avec la Californie.

Cette affaire a encore accru le malaise

Publié en plein été, le décret qui a reçu l’aval du Conseil d’Etat – de justesse, selon certaines sources internes du ministère des affaires étrangères – paraît surtout rédigé sur mesure pour permettre d’installer Phlippe Besson dans ce poste de prestige jadis occupé par Romain Gary, écrivain mais diplomate de carrière. « Une réforme au service d’intérêts particuliers ?», s’interroge indignée la CFDT-MAE, qui ne souhaite pas encore pour le moment évoquer sur quels points se fonde sa mise en cause du texte. En 2012, à la fin de la présidence de Nicolas Sarkozy, ce syndicat avait obtenu du Conseil d’Etat l’annulation de la nomination de deux ambassadeurs bien en cours, mais jugés finalement encore trop inexpérimentés pour occuper de telles fonctions.

« Il y a dans ce décret une part évidente de mépris vis-à-vis des personnels et de leurs compétences », dénonce Carl Poirier, un des représentants de la CFTC. La « brutalité » – selon les mots de plusieurs diplomates – de l’Elysée dans cette affaire a encore accru le malaise, alors même que la diplomatie française doit se serrer la ceinture avec la réduction de 10 % de la masse salariale pour les agents à l’étranger. En poste depuis 2015 à Los Angeles, Christophe Lemoine, ancien directeur de cabinet de Laurent Fabius, a appris au dernier moment qu’il était remplacé. On peut faire plus élégant.