Désormais, tous les matchs de Division 1 seront retransmis à la télévision et plus seulement les affiches entre l’OL et le PSG. / PATRICK HERTZOG / AFP

A moins d’un an de la Coupe du monde, qui se tiendra en France (du 7 juin au 7 juillet 2019), le changement a de l’importance. Pour la première fois de son histoire, tous les matchs du championnat de France féminin de football, soit 132 au total, seront diffusés en direct à la télévision. Une telle médiatisation était inespérée il y a encore quelques années. Samedi 8 et dimanche 9 septembre, la deuxième journée de la Division 1 aura ainsi les honneurs du petit écran, sur Canal+.

Longtemps cantonnés aux affiches entre l’Olympique lyonnais, champion de France inamovible depuis 2007, et le PSG, son principal rival, les téléspectateurs peuvent désormais suivre les performances de tous les autres clubs d’une élite, qui en recense douze. Détenus jusqu’alors par France Télévisions et Eurosport pour 200 000 euros par saison, les droits de la D1 ont été achetés par le groupe Canal+, avec au passage une belle revalorisation. On parle de 1,2 million d’euros environ par saison.

Le dispositif est novateur et très complet. Le dimanche, une affiche est diffusée sur Canal+ sport à 15 heures [PSG-Paris FC le 9 septembre]. Le samedi, un match directeur, agrémenté d’un multiplex des buts des quatre autres rencontres, se déroule sur Canal+ sport à partir de 14 h 30. Les quatre matchs sont aussi retransmis en intégralité sur les canaux de Foot + (diffusion à la carte). En prime, la D1 fera des apparitions dans toutes les émissions consacrées au football, du « Canal football club », à J + 1, ou même à la mi-temps des affiches de Ligue 1, diffusées à 17 heures.

« La certitude d’un potentiel »

Jeune retraitée, l’ancienne internationale Jessica Houara-d’Hommeaux sera l’une des consultantes en compagnie notamment de son ex-coéquipière Laure Boulleau. Elle alternera entre des interventions en plateau au sein des émissions et le commentaire en direct des rencontres. « Cette diffusion est une forme de reconnaissance pour toutes les joueuses qui travaillent quotidiennement et qui sont reconnues par ce biais-là », confie l’ex-joueuse de l’Olympique lyonnais.

Lors de la première journée, dimanche 26 août, Lille-Lyon a réuni une audience de 106 000 spectateurs. « Ce sont des chiffres tout à fait corrects. Au début, l’audience n’est pas l’enjeu et nous n’aurons pas les yeux rivés dessus. Ce mode de diffusion est nouveau, il faut qu’on le fasse savoir. Nous avons cinq ans devant nous et nous avons conscience que l’on est sur quelque chose qui se construit », défend Laurent Jaoui, rédacteur en chef de Canal+, chargé de l’éditorial du projet.

En 2017, le groupe avait déjà racheté les droits de la Coupe du monde féminine 2019 à TF1. Depuis quelques années, ses chaînes diffusaient également des matchs de la Ligue des champions féminine et des Bleues.

« Il y a une volonté de médiatiser un championnat qui, jusqu’alors, n’avait pas la place qu’il méritait. Nous avons la certitude d’un potentiel du football féminin qui est moins formaté, où il y a moins de pression et d’argent. On revient un peu au côté originel du foot, explique Laurent Jaoui, On était un peu plus faible sur Canal+ sport. On a perdu la Premier League, on ne va pas refaire l’histoire. La D1 se prête bien à nos débuts d’après-midi. C’est un bon produit d’appel, novateur et porteur d’espoir. »

Adapter les stades

Du côté de la Fédération française de football (FFF), organisatrice de la Division 1 féminine, la vice-présidente, Brigitte Henriques, se félicite de cet accord. Et elle tient à mettre en avant la personnalité du patron des sports de Canal+ : « Thierry Cheleman a été à l’origine de la diffusion des Bleues lors du Mondial 2011 sur C8. C’était le début de la belle histoire avec les records de la TNT explosés à l’époque alors que personne ne voulait du foot féminin. Cette fois-ci encore, il a compris ce que pouvait valoir la D1 avec la perspective, en plus, du Mondial en France. »

Chargée du développement du football féminin depuis de nombreuses années, l’ancienne internationale se réjouit du chemin accompli. « En 2011, au retour du Mondial avec le président Noël Le Graët, quand il avait proposé le premier appel d’offres pour la D1, j’avais dit “oh là là, ça va vite”. Je n’étais pas sûre que l’on soit prêt. En fait, il avait eu raison, se souvient-elle. Pour ce deuxième appel d’offres, il y a eu une vraie bataille entre plusieurs diffuseurs, ce qui n’avait pas été le cas la dernière fois. C’est un gros tournant d’être le premier pays d’Europe à avoir tous les matchs diffusés. »

Derrière le mastodonte lyonnais, triple champion d’Europe en titre, qui dispute parfois des matchs au Parc OL (capacité de 60 000 places), et à un degré moindre après les sections féminines du PSG et de Montpellier, les autres équipes françaises vont connaître une médiatisation toute nouvelle. Depuis un an, la FFF, les clubs et Canal+ se réunissent pour adapter les stades aux exigences minimales d’une diffusion télévisuelle.

Attirer de nouveaux partenaires

A Soyaux, club cent pour cent féminin de Charente, ou par exemple à Rodez (Aveyron), dont l’équipe fanion masculine n’évolue qu’au troisième échelon national, on a accueilli avec enthousiasme le diffuseur. Des nacelles et des structures permanentes pour les caméras ont été par exemple installées

Alors que le budget de la majorité des clubs oscille entre 500 000 euros et 1 million d’euros, on a l’espoir d’un réel développement grâce à la perspective d’attirer de nouveaux partenaires. « C’est comme ça que cela a débuté pour l’équipe de France féminine. L’idée est de faire la même chose pour les clubs. L’argent ne tombe pas du ciel. Il n’y a que cette visibilité-là qui peut augmenter leurs moyens et générer une vraie économie », défend Brigitte Henriques.

Une autre bonne nouvelle peut inciter à l’optimisme : le succès de la Coupe du monde des moins de 20 ans en Bretagne au mois d’août. « En moyenne, nous avons eu 350 000 téléspectateurs pour les matchs des Bleues et un pic à 1 million lors de la demi-finale. Ce sont de bons indicateurs pour le foot féminin en France », ajoute la vice-présidente du comité d’organisation du Mondial 2019.

Il ne manque plus qu’un premier titre international des Bleues au mois de juillet 2019 pour que l’avenir du football au féminin en France s’annonce des plus radieux.