Alphonse Areola a réalisé un arrêt spectaculaire, jeudi 6 septembre, à Munich, lors du match d’ouverture de la Ligue des nations, France-Allemagne. / ANDREAS GEBERT / REUTERS

Alphonse Areola, 25 ans, est-il actuellement le meilleur gardien de but français ? La question revient en boucle depuis que le portier du Paris-Saint-Germain, auteur de plusieurs arrêts spectaculaires pour sa première sélection, a permis aux Bleus de décrocher un nul (0-0) contre l’Allemagne, jeudi 6 septembre, à Munich, en ouverture de la Ligue des nations. Sitôt le match terminé, les journalistes se sont d’ailleurs empressés de sonder les meilleurs spécialistes du poste pour analyser la performance de l’actuel numéro 3 dans la hiérarchie tricolore, sacré champion du monde en Russie et animé par un « sentiment d’invincibilité » en Bavière.

Interrogé par Le Figaro, l’entraîneur français des gardiens de Chelsea, Christophe Lollichon, s’est montré dithyrambique. « Pour moi, c’est le meilleur gardien français actuel, a-t-il estimé, sans prendre de gants. Il a tous les critères pour être le numéro un de l’équipe de France. La taille, le jeu au pied, l’envergure, la détente, le jeu de jambes, c’est le portier le plus adapté au jeu des Bleus. »

Si la prestation d’Areola a séduit les observateurs, les cartes sont-elles pour autant rebattues dans la cage des Bleus ? Pour le dire autrement, le Parisien peut-il passer devant le numéro 2 Steve Mandanda, 33 ans et actuellement blessé, et s’imposer comme la doublure du gardien et capitaine Hugo Lloris, 31 ans et lui aussi forfait pour ces matchs internationaux de septembre ?

Questionné par LCI, Bernard Lama est plus prudent. « Premièrement, Mandanda n’est pas sélectionnable en ce moment. Deuxièmement, Areola vient de vivre sa première sélection, relativise l’ex-portier des Bleus et du PSG. Mandanda, il est là depuis dix ans. Ce n’est pas un match qui va bouleverser la hiérarchie, ça ne se passe pas comme ça. Il lui faudra faire plus. Mais voilà, depuis jeudi, on sait que notre gars, il est là ! »

La concurrence avec Buffon au PSG

Sur son nuage, Areola sera de nouveau titularisé par le sélectionneur Didier Deschamps, dimanche 9 septembre, contre les Pays-Bas, au Stade de France. Pour ce deuxième match de la Ligue des nations, le natif de la capitale espère rester sous les feux de la rampe. En cette entame de saison, ce n’est d’ailleurs pas sa situation en équipe de France mais plutôt celle avec le PSG qui pose question.

En s’élevant au niveau de son homologue allemand, Manuel Neuer, à Munich, Areola a pris date et surtout envoyé un signal fort à son entraîneur, l’Allemand Thomas Tuchel. Le moment était idéal. Car les dirigeants parisiens ont donné, cet été, l’impression de fragiliser leur jeune portier d’origine philippine, formé au club, en recrutant la légende italienne Gianluigi Buffon, 40 ans.

Venu en France pour apporter sa culture de la gagne et son expérience européenne à l’écurie de Qatar Sports Investments (QSI), le champion du monde 2006 a d’ailleurs débuté la saison comme numéro 1. Mais sa suspension pour trois matchs en Ligue des champions permet actuellement à Areola, peu désireux de jouers les doublures, d’enchaîner les matchs.

« Je ne pense pas que Gigi [Buffon] puisse aider Areola en équipe de France, a récemment commenté Didier Deschamps, qui ne tarit pas d’éloges sur son numéro 3, sacré champion du monde avec l’équipe de France des moins de 20 ans, en 2013. Il jouera peut-être moins, mais cela n’enlève rien à ses qualités. Le fait de côtoyer Buffon, un gardien avec une grande expérience, quelqu’un de très généreux, ne posera pas de problème sur le plan humain. »

Le parcours sinueux d’un surdoué

Rompu à la concurrence, Areola avait déjà dû ferrailler avec l’Allemand Kevin Trapp lors de l’exercice 2016-2017. Au sortir d’un parcours éclatant avec l’équipe espagnole de Villareal, avec laquelle il avait atteint les demi-finales de Ligue Europa contre Liverpool, le jeune gardien avait décidé de retrouver son club formateur, alors téléguidé par l’entraîneur espagnol Unai Emery. Ce dernier l’avait définitivement installé au poste de numéro 1, la saison passée, lui donnant les clés tant en Ligue 1 qu’en Ligue des champions.

Depuis son arrivée au centre de formation du club parisien, en 2006, le parcours du gardien au PSG est sinueux. Longtemps, le jeune homme au profil de surdoué a dû faire les cent pas dans l’antichambre avant de garder la cage de l’effectif professionnel.

« Avec Alain Roche [alors responsable du recrutement du PSG], on croyait beaucoup dans les capacités de ce gosse explosif, réactif et doté de qualités au sol et dans les airs. On voulait le garder dans le patrimoine du PSG car il pouvait être l’un des futurs gardiens de l’équipe de France, nous racontait, en 2016, Charles Villeneuve, éphémère (2008-2009) patron du PSG. On a attendu qu’il ait 16 ans pour lui faire signer un contrat professionnel et il est rapidement devenu le gardien numéro 3 du club. »

Surnommé « Superstar » durant ses années d’apprentissage à l’INF Clairefontaine, Areola a attendu patiemment son heure avec l’équipe réserve du PSG. Le 18 mai 2013, à 20 ans, il dispute son premier match en Ligue 1 en remplaçant Salvatore Sirigu lors d’une victoire (3-1) contre Brest, au Parc des Princes. Ce jour-là, sous les yeux de l’entraîneur parisien Carlo Ancelotti, il évolue aux côtés de la « pop star » anglaise David Beckham, qui dispute le dernier match de sa carrière.

En concertation avec Leonardo, le directeur sportif du PSG, et son successeur, Olivier Létang, Areola est ensuite prêté à Lens pour une saison. Cette parenthèse avec les Sang et Or lui est profitable dans la mesure où il est élu, à 21 ans, meilleur gardien de Ligue 2. Les difficultés financières du club artésien le poussent toutefois à s’engager sous la forme d’un prêt à Bastia. Le jeune homme s’aguerrit en Corse tout en enchaînant les matchs parmi l’élite. En avril 2015, il dispute même la finale de la Coupe de la Ligue contre son club formateur, s’inclinant lourdement (4-0).

« J’espère mériter ce que je dois mériter »

Une fois revenu au PSG, Areola donne un nouveau tour à sa carrière en rejoignant l’écurie du fantasque agent italo-néerlandais Mino Raiola. L’impresario gère également les intérêts de l’ex-star suédoise du club parisien (2012-2016), Zlatan Ibrahimovic, de l’ex-arrière gauche brésilien Maxwell (2012-2017), devenu « coordinateur sportif » du PSG, ainsi que de ses partenaires tricolores Blaise Matuidi et Paul Pogba.

Depuis l’arrivée de Buffon, Mino Raiola et Areola n’ont pas souhaité entamer un bras de fer avec les dirigeants parisiens. Mais le jeune gardien, scruté par de grandes équipes européennes, n’entend pas abdiquer face à l’Italien, monument à son poste. Sous contrat jusqu’en juin 2019, Areola traîne d’autant plus des pieds pour le prolonger que cette saison pourrait s’apparenter à une guerre des nerfs avec son expérimenté concurrent

« Des discussions ont été abordées avec le club, j’espère être performant et mériter ce que je dois mériter, a confié Areola sur TF1, ce dimanche. Jouer à la maison, c’est encore mieux. » Ses prouesses avec les Bleus devraient le conforter dans sa stratégie.