Si vous avez compris le fonctionnement de la Ligue des nations de football, vous comprendrez sans doute celui du Championnat du monde de volley, qui s’est ouvert dimanche 9 septembre : deux pays organisateurs (Italie et Bulgarie) ; trois phases de poules avant les demi-finales ; et des modes de qualification à poser sur un calepin comme une équation à double inconnue.

« Même pour nous, c’est compliqué à lire », convient le libero de l’équipe de France, Jennia Grebennikov, même si Laurent Tillie, le sélectionneur des Bleus, a appris à ne plus s’énerver devant les formules alambiquées concoctées par la Fédération internationale de volley-ball (FIVB) : « L’essentiel, c’est qu’entre volleyeurs, on arrive à se comprendre : on sait que la formule change tout le temps. »

Les tournois ne sont pas conçus pour être lisibles mais pour multiplier le nombre de rencontres, et ainsi augmenter la valeur des droits de retransmission télévisée. Ainsi le Championnat du monde est-il conçu comme un feuilleton de trois semaines, dont le vainqueur aura disputé pas moins de douze matchs. Douze matchs à enjeu, car tous les résultats sont conservés dans l’optique de la qualification pour le troisième tour.

Le calendrier des Mondiaux tient sur une feuille A3.

Le champion olympique brésilien au premier tour

Pour les Bleus, le marathon commence mercredi 12 septembre dans la petite ville de Roussé, à la frontière avec la Roumanie. Une salle confidentielle de 5 100 places pour accueillir une poule relevée, avec notamment le champion olympique brésilien, le Canada et la Chine, potentiels trouble-fête.

« Il faut sortir de la poule à la première place au pire à la deuxième si on veut faire un podium, explique Laurent Tillie. On ne peut pas faire de calcul, ni bénéficier d’un match de rodage, dans la mesure où l’on conserve ces résultats dans la deuxième phase. »

« C’est super éprouvant physiquement et mentalement, parce qu’il y a tellement de matchs à jouer, c’est super long, complète Jennia Grebennikov. Si tu lâches un ou deux points sur la première phase, tu te mets déjà dans la difficulté. »

Le podium, objectif annoncé pour l’équipe de France, se jouera à Turin le dernier week-end de septembre. Après un titre européen en 2015, et deux victoires en Ligue mondiale (2015, 2017), la génération du réceptionneur-attaquant vedette Earvin Ngapeth aimerait au moins égaler sa prédécesseure, médaillée de bronze aux Mondiaux en 2002.

Il ne lui est pas interdit de faire mieux, même si les immenses Russes, qui l’ont dominée en finale de la Ligue des nations — nouvelle appellation de la Ligue mondiale — en juillet à Lille, partent favoris.

Repos et préparation physique

Stephen Boyer, Nicolas le Goff et Julien Lynee, ici au contre face à la République tchèque lors des Championnats d’Europe 2017, sont à nouveau dans la sélection de Laurent Tillie pour le Mondial. / PIOTR NOWAK / AFP

Au jeu inventif et à la défense acharnée de Ngapeth, de Grebennikov, du passeur Benjamin Toniutti et du central Kevin Le Roux, il faut désormais ajouter l’expérience comme atout des Bleus. S’ils n’ont pas encore 30 ans, ces quatre-là — tous parmi les meilleurs du monde à leur poste — forment l’ossature de l’équipe de France depuis quatre ans.

Et le jeune pointu Stephen Boyer (22 ans) a presque fait oublier Antonin Rouzier, retraité international après les Jeux de Rio. Onze des quatorze joueurs de Laurent Tillie jouent désormais à l’étranger, dans des clubs du plus haut niveau, où ils occupent un rôle important.

Mais si l’on écarte la Ligue mondiale, parfois négligée par les grandes nations, la France a raté ses deux derniers tournois internationaux : les Jeux olympiques 2016 et l’Euro 2017, partiellement en raison de la fatigue accumulée au fil des longues saisons en club et des tournois internationaux.

Cette fois, les hommes de Laurent Tillie ont eu droit à trois semaines de vacances après la Ligue des nations et auront accumulé cinq semaines et demie de préparation avant le Mondial. De quoi, espère leur sélectionneur, tenir la distance des dix-huit jours de compétition.

L’inquiétude née d’une blessure aux abdominaux d’Earvin Ngapeth au début du mois s’est dissipée à la suite de nouveaux examens, même si Laurent Tillie n’est pas certain que la star des Bleus puisse débuter contre la Chine mercredi. En 2017, à l’Euro, la blessure de Ngapeth, absent une bonne partie de la compétition, avait fait dérailler les Bleus (classés au 9e rang final).

Laurent Tillie reste toutefois prudent : « Quand je vois ces blessures [l’autre réceptionneur-attaquant, Trévor Clévenot, est forfait pour la compétition], j’ai l’Euro 2017 dans un coin de ma tête, convient le sélectionneur. Quand on se brûle, on a peur de remettre la main. » Celle de Ngapeth fourmille déjà : « Quand tu es blessé, l’envie de jouer qui sort de toi est incroyable. »