La guérilla colombienne de l’Armée de libération nationale (ELN) a libéré mercredi 12 septembre six de ses otages, mais le président Ivan Duque a maintenu son exigence que la rébellion relâche la totalité de ses prisonniers.

Ces otages, trois policiers, un soldat et deux agents contractuels de l’État, avaient été enlevés le 3 août par l’ELN, dernière guérilla de Colombie, alors qu’ils se déplaçaient, en civil et sans armes selon les autorités, sur une rivière du département pauvre du Choco (nord-ouest, frontière du Panama).

Ils ont été remis à une commission humanitaire composée du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), de l’Église catholique et du Défenseur du peuple, organisme public chargé de la protection des droits humains. « Aujourd’hui [mercredi] dans le Choco, nous avons accompagné la commission humanitaire qui a facilité la libération de six personnes qui étaient aux mains de l’ELN depuis août. Nous sommes heureux qu’elles retrouvent bientôt leurs familles », a tweeté le CICR, en se refusant à toute autre déclaration.

La libération a eu lieu « au milieu d’un important déploiement militaire » et « en dépit des difficultés et des obstacles mis par le gouvernement », a pour sa part affirmé le commandant Uriel, du Front de guerre occidental Omar Gomez de l’ELN, qui avait revendiqué ces enlèvements. « Nous avons toujours traité les détenus de la meilleure manière possible dans ces conditions », a-t-il assuré dans un communiqué.

Duque reste ferme

Le président colombien a ensuite réitéré son exigence que l’ELN libère la totalité de ses otages. Ils seraient désormais au moins neuf, selon la dernière estimation des autorités. « Le principe d’une réelle volonté de paix passe par la libération de tous les otages », a déclaré le chef de l’État, depuis Pasto (sud-ouest). « Et si nous voulons construire une paix avec ce groupe armé, eux-mêmes doivent commencer par une volonté claire, qui est la suspension de toutes les activités criminelles », a-t-il ajouté.

Lancés officiellement en février 2017 à Quito en Équateur, les pourparlers de paix avec l’ELN, délocalisés ensuite à Cuba, avaient été suspendus sous le précédent gouvernement du président centriste Juan Manuel Santos.

Lors de sa prise de fonction le 7 août, le président de droite Ivan Duque s’était donné un mois pour décider de la suite de ces négociations. Au terme de ce mois, il avait exigé samedi que la guérilla libère tous ses otages et cesse toute activité criminelle.

La violence continue

La guérilla avait lundi jugé ces conditions « inacceptables ». Dans un communiqué publié à La Havane, elle avait estimé qu’en refusant de reconnaître les accords passés sous la présidence de M. Santos et « en imposant unilatéralement des conditions inacceptables, ce gouvernement (…) met fin au processus de dialogue ». L’ELN souhaite une reprise des pourparlers « sans plus d’atermoiements ». Elle avait cependant indiqué qu’un « plan unilatéral de remise en liberté » de six personnes était « en préparation ».

La violence continue, déplore le gouvernement. Le Haut-Commissaire pour la paix, Miguel Ceballos, a affirmé qu’en un mois l’ELN avait commis 30 « actions armées », dont 28 dans le département d’Arauca, frontalier du Venezuela.

Inspirée des idées du révolutionnaire Che Guevara et comptant encore quelque 1 500 combattants, l’ELN est considérée comme la dernière rébellion active du pays depuis l’accord de paix signé fin 2016 avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), aujourd’hui transformées en parti politique sous le même acronyme.

Selon les autorités, l’ELN, née comme les Farc en 1964 d’une insurrection paysanne, se finance grâce au trafic de drogues et à l’extraction minière clandestine.

Un accord de paix avec l’ELN permettrait de mettre fin à la guerre qui déchire la Colombie depuis plus d’un demi-siècle. Au fil des décennies, ce conflit complexe a impliqué une trentaine de guérillas, des milices paramilitaires d’extrême-droite et les forces armées, sur fond de violences des narco-trafiquants, faisant environ huit millions de victimes entre morts, disparus et déplacés.