L’armée russe a indiqué, mardi 18 septembre, qu’un de ses appareils avait été abattu par erreur par des batteries anti-aériennes syriennes lors de tirs désordonnés pendant la nuit. L’avion de surveillance a disparu avec 14 militaires à bord au large des côtes syriennes, alors que des raids aériens attribués à Israël ont par ailleurs visé des cibles militaires dans la région. Ces frappes ont eu lieu près des villes de Lattaquié, Baniyas et Tartous, sur la côte nord-ouest du pays. Elles sont survenues quelques heures après que la Russie a annoncé le report d’une offensive sur la ville syrienne d’Idlib.

La région de Lattaquié est un lieu particulièrement sensible, car elle accueille la base des forces aériennes russe de Hmeimim à 15 km de la ville portuaire. Moscou y a notamment déployé ses batteries de défense aérienne S-400. Selon les médias syriens, l’armée régulière a utilisé ses propres batteries pour répondre aux frappes, interceptant plusieurs missiles. Des images prises par les habitants de la région le confirment, en montrant des départs de missiles sol-air et des tirs de DCA.

Vers 23 heures, l’avion de surveillance électronique de type Il-20 a disparu à 35 kilomètres des côtes syriennes, alors qu’il revenait à la base aérienne de Hmeimim, a indiqué le ministère de la défense à Moscou. Au même moment, alors que quatre F-16 israéliens effectuaient leur raid sur Lattaquié, les radars russes auraient enregistré des frappes déclenchées par la frégate française Auvergne contre des installations militaires syriennes, prétend Moscou.

Avant la confirmation par Moscou de l’erreur de la défense aérienne syrienne, Paris a démenti catégoriquement sa participation à une telle opération. « Nous démentons toute implication », a dit le colonel Patrik Steiger, porte-parole de l’état-major. Un représentant du Pentagone avait fait de même un peu plus tôt, au micro de Voice of America : « Je peux dire sans équivoque que ce n’est pas nous. »

Dans la soirée, la télévision d’Etat syrienne précisait que des missiles d’origine « inconnue » avaient visé l’Etablissement des industries techniques, situé dans la zone industrielle de la ville, et diffusait les images d’un incendie. Selon elle, les défenses aériennes avaient intercepté et abattu un certain nombre de missiles qui « venaient de la mer ».

La Russie rend Israël responsable

Une résidente de Banias a confirmé au Monde avoir aperçu « une grande lueur rouge, lointaine, suivie d’une forte détonation. Cela venait de l’extérieur de la ville ». Au moins trois fortes déflagrations ont secoué la ville de Lattaquié, d’après des images diffusées sur les réseaux sociaux. La Russie rend directement responsable Israël de la perte de son appareil, indiquant n’avoir été prévenu qu’« une minute avant le début des frappes ». Moscou et Tel-Aviv conservent depuis plusieurs années un système de désescalade, pour prévenir tout dérapage majeur dans le ciel syrien.

La France s’est dite prête récemment à utiliser de nouveau la force militaire en Syrie, mais uniquement en cas d’usage d’armes chimiques dans une offensive de l’armée syrienne et de ses alliés contre Idlib. Paris avait participé à des frappes aériennes en avril, aux côtés du Royaume-Uni et des Etats-Unis, pour un tel motif. Dans un communiqué commun publié le 21 août, à l’occasion du cinquième anniversaire de l’attaque sanglante à l’arme chimique à la Ghouta, les trois pays s’étaient dits « résolus à agir si le régime de Bachar Al-Assad a de nouveau recours aux armes chimiques ».

Côté israélien, où l’on s’apprête à fêter Yom Kippour, aucune réaction officielle n’a été exprimée après les raids de lundi. L’Etat hébreu ne cache cependant plus son implication en Syrie depuis le début de l’année. Selon l’Observatoire syrien pour les droits de l’homme, l’aviation israélienne aurait tué 113 Iraniens déployés au côté du régime Assad au cours de raids effectués en un mois.

Samedi 15 septembre, une frappe a visé l’aéroport international de Damas, dont les entrepôts de stockage d’armes lourdes, sous le contrôle présumé des forces iraniennes, sont la cible régulière de l’armée israélienne. En début de soirée, un Boeing 747 cargo de la compagnie aérienne iranienne Saha Airlines y avait atterri. Quelques heures plus tard, le périmètre a été secoué par une explosion. Une image satellite prise le lendemain montre un impact et les restes des traces d’incendie d’une centaine de mètres de circonférence devant l’appareil, toujours immobilisé.

Le 4 septembre, deux hangars près de Damas avaient été détruits. Au même moment, la presse israélienne rapportait, sur la foi de sources militaires, que l’armée avait visé 202 cibles en Syrie depuis janvier 2017, tirant 800 munitions au total.