Yitzahk Rabin, Bill Clinton et Yasser Arafat, lors de la signature des accords d’Oslo, le 13 septembre 1993 à la Maison Blanche, à Washington. / J. DAVID AKE / AFP

Editorial du « Monde ». Il y a vingt-cinq ans, un vent d’optimisme soufflait sur la Maison Blanche. En ce 13 septembre 1993, Bill Clinton, bras écartés, saluait la poignée de main entre le premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, et le chef de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Yasser Arafat. ­Négociés en secret auparavant dans la capitale norvégienne, les accords d’Oslo reposaient sur une reconnaissance mutuelle entre l’OLP et l’Etat hébreu. Ils commençaient à tracer un chemin par étape vers l’émergence d’un Etat palestinien.

Deux ans plus tard, en novembre 1995, le premier ministre israélien était assassiné par un extrémiste juif. Les questions non résolues, brûlantes, demeuraient sur la table, comme le statut final de Jérusalem ou la question des réfugiés palestiniens et de leurs descendants. Malgré de nouveaux cycles de négociation, la paix n’a cessé de se dérober. Tandis que le vocabulaire d’Oslo, autour du concept de « solution à deux Etats », se vidait peu à peu de sa substance, un profond pessimisme s’est installé au sein des deux sociétés.

Division et pessimisme

Côté palestinien, la division entre factions a provoqué la séparation de destin entre la Cisjordanie et la bande de Gaza. Côté israélien, ce pessimisme s’explique par l’expérience des attentats sanglants de la seconde Intifada, au début des années 2000, et la prise de contrôle de Gaza par le Hamas après le retrait unilatéral des colons qui y vivaient. L’idée qu’il n’y avait pas de partenaire crédible pour faire la paix a fini par s’imposer. La colonisation s’est accélérée, au mépris du droit international. De 113 000 environ au moment des accords d’Oslo, selon l’organisation La Paix maintenant, le nombre de colons est passé à 413 000 fin 2017.

La Cisjordanie est mangée, colline après colline, par les colonies. Dans le débat public israélien, des idées, encore marginales ces dernières années, comme l’annexion pure et simple de la zone C (60 % de la Cisjordanie) ou la légalisation de tous les avant-postes, se sont banalisées à droite. La bande de Gaza est devenue, après un blocus de onze ans imposé par Israël et l’Egypte, l’un des territoires les plus denses et les plus insalubres du monde.

Le « deal du siècle » de Trump

A cette atmosphère déjà lourde s’est ajoutée la présidence Trump. Dès son arrivée à la Maison Blanche, celui-ci a prétendu parvenir au « deal du siècle » au Proche-Orient, en brisant, un par un, les fragiles consensus du passé. Sa stratégie consiste à favoriser un rapprochement sans précédent entre Israël et les pays arabes, à commencer par l’Arabie saoudite, en forçant la direction palestinienne à accepter une paix aux conditions les plus favorables possibles pour l’Etat hébreu.

Le médiateur américain n’a jamais été impartial. Mais, cette fois, il est plus pro-israélien qu’Israël, au risque de mettre en péril la sécurité à long terme de l’Etat hébreu. La reconnaissance unilatérale de Jérusalem comme capitale d’Israël, puis les punitions financières contre les Palestiniens et l’arrêt du financement de l’UNRWA, la mission de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, portent en eux les germes de violences futures.

Israël s’est habitué à vivre avec l’idée qu’il payait un prix relativement faible pour l’occupation, notamment sur le plan international – grâce à la protection américaine. Mais croire que les Palestiniens nés après Oslo, soumis au régime discriminatoire de l’occupation, renonceront un jour à être des citoyens relève de la cécité politique.