Avec les Bleuse, Valerie Garnier a remporté deux médailles d’argent européennes. / NICOLAS TUCAT / AFP

Valérie Garnier a pu respirer. Opposée à la Corée du Sud et son basket atypique en ouverture du championnat du monde féminin de basket, samedi 22 septembre, l’équipe de France a réussi son entrée en matière. Une large victoire (89-58) est venue récompenser les coéquipières de Sandrine Gruda (12 points, 8 rebonds, 3 passes décisives) et leur entraîneuse, qui se méfiait du piège que pouvait représenter l’inconnue coréenne en entame de Mondial. « Un match très positif, c’était important de mettre de l’intensité », s’est félicitée la coach au terme de la rencontre.

Aux manettes des Bleues depuis 2013 - après avoir longtemps été adjointe -, Valérie Garnier aspire à mener ses ouailles sur leur premier podium mondial depuis… 1953, et la première édition des championnats du monde. Une ambition que cette technicienne de 53 ans n’envisage qu’à condition d’effectuer « un parcours d’excellence » dans cette compétition resserrée - une semaine à peine.

Lire la présentation de la compétition : Les Bleues et l’écueil mondial

Avoir une femme sur le banc d’une sélection nationale n’est, même en 2018, pas encore une chose commune. A Tenerife, où se déroule le Mondial, elles ne sont que quatre (sur seize équipes engagées) à être entraîneuses numéro 1. En ce qui concerne la France, Valérie Garnier est la seule femme, avec Corinne Diacre au football, à avoir pris place sur le banc d’une équipe nationale de sport collectif. Une absence que l’on retrouve également dans les catégories inférieures.

« Quand on voit les entraîneurs des équipes nationales de jeunes, vous cherchez combien il y a de femmes, tous sports confondus, ça se compte sur les doigts d’une main », relève l’ancienne joueuse française des années 1980, Cathy Malfois, qui regrette qu’« être entraîneuse nationale, ce (ne soit) pas la norme ». Ce qui souligne, en filigrane, le parcours de Valérie Garnier.

Joueuse au style très offensif

L’entraîneuse de l’équipe de France est tombée dans la balle orange dès le plus jeune âge. Avant de s’asseoir - quand elle n’est pas debout à donner des instructions à ses joueuses - sur un banc de touche, Valérie Garnier a mené une carrière de joueuse professionnelle. Sur le terrain, c’était une meneuse flamboyante, « un petit Mozart, disait d’elle l’entraîneur Alain Jardel, qui l’avait recrutée à Mirande en 1983 alors qu’elle passait son bac. Elle comprenait tout avant tout le monde. »

Associée à la jeune Yannick Souvré - qui tiendra la mène en équipe de France treize années durant -, elles forment un duo explosif. « Elle était totalement différente de moi, c’était l’eau et le feu, se souvient Souvré, au jeu plus académique. Elle était très offensive, aimait shooter, marquer, et pouvait parfois être considérée comme individualiste. Mais Alain Jardel aimait nous aligner ensemble. »

Et c’est auprès de celui qui présida aux destinées de l’équipe de France pendant neuf ans (1997 - 2006) que Valérie Garnier tombe dans le chaudron du coaching. « J’avais du temps libre à côté des matches donc quand j’avais des questions, je les posais à Alain, se remémorait-elle, en 2017, dans Les Sportives. Je l’accompagnais aussi aux stages départementaux. »

Une fois sa carrière sur le terrain achevée, en 1994, Valérie Garnier enchaîne directement sur le banc. Petit à petit, elle monte en grade, jusqu’à prendre en main le club de Bourges, l’un des bastions du championnat de France, en 2011. Trois titres nationaux suivront, ainsi qu’une Coupe européenne (l’équivalent de la Ligue Europa au football). En parallèle, elle assiste Alain Jardel puis Pierre Vincent en équipe de France, étés après étés.

« C’est une passionnée », salue Jacky Chazalon, tête d’affiche des basketteuses françaises dans les années 1960. L’ancienne joueuse du CUC de Clermont admire la transition de Garnier, du terrain vers le banc de touche, mais regrette que l’entraîneuse française ne se lâche pas un peu plus en bord de terrain : « quand on joue au sport de haut niveau, on ne joue pas sa vie. »

Coach à grande intensité

Une image d’intensité qui accompagne Valérie Garnier depuis ses débuts d’entraîneuse. Coach exigeante, elle demande à ses joueuses une présence en défense de tout instant. Ce dont s’amuse son ancienne coéquipière Yannick Souvré. « C’est drôle d’entendre ses joueuses parler de son exigence en défense, alors que Valérie n’était pas connue pour être la meilleure défenseuse de France. »

Désormais reconnue pour ses résultats avec les Bleues - deux médailles d’argent européennes et une quatrième place aux Jeux olympiques, Valérie Garnier a été recrutée au printemps par le club turc de Fenerbahçe, qu’elle a mené au titre national en quelques mois.

Devant composer cette année avec la retraite de l’emblématique star de l’équipe, Céline Dumerc - fer de lance de l’épopée argentée des Jeux olympiques de Londres -, Valérie Garnier a renouvelé son groupe, cocktail de jeunesse et d’expérience. Et adapté son projet de jeu à son équipe.

« Elle était presque trop rigoureuse dans son approche à ses débuts en bleu, analyse Cathy Malfois, mais elle a changé. » Et de saluer une entraîneuse « volontaire et très perfectionniste ».

Si le basket des Françaises demeure axé sur une défense ardente, signe que la coach Garnier a été « formatée par Alain Jardel », estime Yannick Souvré, leur jeu offensif est plus débridé. « Elle s’appuie sur un style de jeu correspondant aux qualités de ses joueuses, relève Jacques Commères, directeur de la performance et des équipes nationales à la Fédération française de basket (FFBB). Cette équipe court beaucoup, met une grosse pression défensive, et tire le maximum de ses capacités physiques. Et les douze joueuses peuvent être dangereuses offensivement. »

Une réussite en attaque qui s’est vue contre la Corée du Sud. Mais les Françaises n’ont guère le temps de s’attarder sur leurs lauriers. Dimanche, la Grèce se présente devant elles (à 18 h 30, heure française), avant un probable match pour la première place de la poule, mardi contre le Canada. Une place « primordiale », insiste Valérie Garnier, « si l’on veut aller loin dans la compétition ». Et comme leur entraîneuse, les Bleues sont ambitieuses.