Sylvie et Dominique Mennesson quittent le palais de justice de Paris, le 6 avril 2011. / BERTRAND GUAY / AFP

C’était une décision très attendue par Sylvie et Dominique Mennesson, qui demandent depuis dix-huit ans la reconnaissance de leur lien de filiation avec leurs filles nées d’une mère porteuse aux Etats-Unis.

Vendredi 5 octobre, la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, devait se prononcer pour la troisième fois, et sans doute la dernière, sur cette affaire. Mais elle a finalement décidé de ne pas statuer.

Les époux Mennesson veulent faire transcrire dans l’état civil français l’acte américain qui reconnaît monsieur comme le père des filles (conçues in vitro avec ses spermatozoïdes et des ovocytes donnés par une amie du couple) et la « mère d’intention » comme étant leur « mère légale ». Une notion inexistante en droit français.

Alors que la loi est muette sur ces cas de figure, la Cour de cassation, qui a déjà été désavouée une première fois dans ce même dossier par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), a décidé cette fois de demander l’avis des juges de Strasbourg, avant de se prononcer.

Un nouvel outil

C’est la première fois qu’une juridiction française recourt à cette possibilité de poser une question préjudicielle à la CEDH. C’est grâce à la ratification par la France au printemps du protocole additionnel nº 16 à la Convention européenne des droits de l’homme que ce nouvel outil, qui existe déjà avec la Cour de justice de l’Union européenne, a pu entrer en vigueur en Europe en août. Paris a permis de franchir le seuil des dix Etats membres signataires.

Concrètement, la question posée par la formation la plus solennelle de la Cour de cassation à la CEDH est la suivante : « En refusant de transcrire sur les registres de l’état civil l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger à l’issue d’une gestation pour autrui, en ce qu’il désigne comme étant sa “mère légale” la “mère d’intention”, alors que la transcription de l’acte a été admise en tant qu’il désigne le “père d’intention”, père biologique de l’enfant, un Etat-partie excède-t-il la marge d’appréciation dont il dispose au regard de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ? A cet égard, y a-t-il lieu de distinguer selon que l’enfant est conçu ou non avec les gamètes de la “mère d’intention” ? »

Cette décision de la haute juridiction est importante, car elle pourrait faire jurisprudence pour d’autres familles, demandant la reconnaissance de la filiation avec des enfants nés par gestation pour autrui. Quant à la famille Mennesson, elle va donc devoir encore attendre avant la conclusion de son affaire.