Eric Swildens n’est pas un avocat spécialisé en propriété intellectuelle payé jusqu’à 1 000 dollars (872 euros) de l’heure. Il vient pourtant de triompher de Google devant l’USPTO, le bureau américain des brevets. Mi-septembre, celui-ci a donné une suite favorable à sa demande de réexamen, annulant quasiment l’intégralité d’un brevet obtenu en 2013 par le moteur de recherche. « Il n’aurait jamais dû être accordé », souligne M. Swildens, interrogé par le site Ars Technica.

Ce brevet porte sur un circuit imprimé utilisé dans la conception du lidar, le système de lasers qui permet aux voitures sans conducteur de cartographier l’environnement et les obstacles en temps réel. Il a joué un rôle central dans la bataille judiciaire qui a opposé jusqu’en début d’année Waymo, filiale de Google, et Uber. La plate-forme de voitures avec chauffeurs était accusée d’avoir volé des secrets industriels, grâce au recrutement d’un ancien ingénieur de Google.

Les avocats d’Uber n’ont jamais cherché à remettre en question la validité du brevet de Waymo. En août 2017, la société s’est ainsi engagée à modifier son lidar pour ne plus utiliser un circuit imprimé similaire à celui de son concurrent. Six mois plus tard, avant même la fin d’un procès très médiatique, elle avait signé un accord à l’amiable avec Google, lui versant pour 245 millions de dollars d’actions afin de mettre fin à la procédure.

La porte ouverte à de nouvelles poursuites

M. Swildens, qui travaille pour une start-up spécialisée dans le cloud computing (l’informatique dématérialisée), a commencé à s’intéresser au dossier au moment de la plainte de Waymo. « Je ne pouvais pas imaginer que ce circuit, qui est très simple, n’existait pas avant ce brevet », indique-t-il. Ses recherches le mènent rapidement vers un brevet quasiment identique déposé en 2011 par Velodyne, un fabricant américain de lidars et ancien fournisseur de Google.

En août 2017, il décide alors de soumettre une demande de réexamen à l’USPTO. Il rédige un rapport de 101 pages pour présenter les résultats de ses investigations et signe un chèque de 6 000 dollars (5 200 euros) pour les frais. Les avocats de Waymo répliquent aussitôt. Ils soumettent de nouveaux documents, citent des experts et tentent de modifier le brevet. En vain.

La décision de l’USPTO pourrait ouvrir la porte à de nouvelles poursuites judiciaires. Velodyne pourrait en effet arguer que Waymo enfreint désormais son brevet. A moins que celui-ci ne soit également invalidé, comme le réclame Quanergy, un autre fabricant de lidars, qui se retrouverait alors en position d’attaquer la filiale de Google.