Les premiers grands principes de la réforme des retraites ont été dévoilés, mercredi 10 octobre, par Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire en charge de ce dossier. Ces arbitrages, qui ne constituent qu’un volet du projet de l’exécutif, annoncent des transformations de grande ampleur.

  • Un « système commun à tous »

Le futur dispositif remplacera, à terme, les quelque 42 régimes actuels (de base et complémentaires). Son financement sera assuré par des cotisations sur les revenus d’activité (salaires, traitements…) que les personnes ont perçus, dans la limite de 120 000 euros bruts par an – soit trois plafonds de la Sécurité sociale.

Dans l’assiette de cotisations, il y aura aussi toutes les primes de fonctionnaires, ce qui constitue un autre changement de taille, puisque aujourd’hui, celles-ci ne sont prises en compte que pour une toute petite part, dans le cadre du régime additionnel de la fonction publique. Cette évolution soulève de multiples questions dans la mesure où le niveau des primes est très variable, selon les catégories d’agents : les enseignants, par exemple, en touchent très peu. Du coup, s’est inquiétée l’UNSA, leurs droits à la retraite risqueraient d’être moindres, comparés à ceux des fonctionnaires qui perçoivent beaucoup de primes. M. Delevoye a précisé, mercredi, qu’« une concertation aura lieu sur les conséquences à tirer de la réforme en termes d’évolution des carrières et des rémunérations » dans la fonction publique.

  • Une condition d’âge inchangée

« L’âge minimum » à partir duquel les personnes pourront réclamer le versement de leur pension est maintenu à 62 ans. Mais la réflexion va se poursuivre pour savoir s’il convient d’ajouter d’autres mesures pour encourager les assurés à prolonger leur vie professionnelle, au-delà de cette borne d’âge. Le Medef y est très favorable. Plusieurs options sont possibles, dont l’une consisterait à s’inspirer du système adopté par les régimes complémentaires du privé : dans ce dispositif, si la personne part à la retraite avant un certain âge (qui varie de 63 à 67 ans, suivant les cas), sa pension est minorée pendant trois ans (et non pas un, comme nous l’avons écrit par erreur dans notre édition du 9 octobre). Par ailleurs, des dispositions spécifiques seront prises en faveur des personnes ayant accompli des métiers pénibles ou des carrières longues.

  • Des équilibres financiers à préserver

M. Delevoye a assuré que la réforme ne sera pas engagée « sous contrainte budgétaire ». Mais il faudra « respecter les trajectoires des dépenses publiques ». Autrement dit, veiller à ne pas laisser filer les déficits. Aujourd’hui, le système est presque à l’équilibre, mais ses besoins de financement vont de nouveau s’accroître et il ne retrouvera la ligne de flottaison qu’au milieu des années 2030, dans le meilleur des cas. Dans ce contexte, la réforme se fera « à enveloppe constante », a dit M. Delevoye. La part des dépenses consacrées aux retraites (environ 14 % du PIB) devra rester inchangée. Le haut-commissaire a aussi évoqué l’idée d’« une règle d’or » à respecter en matière d’équilibres, mais il a récusé la thèse (développée par FO) selon laquelle le dispositif serait tenu de n’avoir aucun déficit, année après année.

  • Des cotisations qui ménagent les indépendants

Aujourd’hui, le niveau des contributions pour financer les retraites varie selon les régimes. Demain, salariés et fonctionnaires cotiseront au même taux, proche de celui actuellement appliqué dans le secteur privé (autour de 28 % si on additionne la participation des employeurs et celle des salariés). Subsiste le cas des indépendants (commerçants, artisans, professions libérales…) qui sont assujettis à des taux plus faibles : ils bénéficieront d’un corpus de règles « adapté, afin de ne pas bouleverser les équilibres économiques de leur activité ».

  • Des dispositifs de solidarités renouvelés

Des points de retraite seront accordés pour chaque enfant dès la première naissance. Dans le système actuel, une majoration de pension est accordée aux deux parents d’au moins trois enfants et les mères bénéficient de trimestres supplémentaires dès la première naissance. Par ailleurs, des points seront également attribués « pour prendre en compte les interruptions d’activité liées aux aléas de carrière ou de vie (chômage, maladie, invalidité…) ». Quant aux pensions de réversion, leur maintien est acquis, mais elles obéiront à des règles nouvelles restant à définir. Enfin, un « minimum de pension » sera prévu pour ceux « ayant travaillé toute leur vie à temps partiel ou avec des revenus modestes ».