• Antonio Salieri
    Les Horaces

    Judith Van Wanroij, Cyrille Dubois, Julien Dran, Jean-Sébastien Bou, Philippe-Nicolas Martin, Andrew Foster-Williams, Eugénie Lefebvre, Les Chantres du Centre de musique baroque de Versailles, Les Talens Lyriques, Christophe Rousset (direction)

Pochette de l’album « Les Horaces », d’Antonio Salieri, avec Les Chantres du Centre de Musique baroque de Versailles, Les Talens Lyriques, Christophe Rousset (direction). / APARTÉ

C’est l’histoire d’un échec : après avoir provoqué la détestation de la reine lors de répétitions à Fontainebleau, en 1786, Les Horaces de Salieri furent créés sous les quolibets à Versailles, avant de disparaître de l’Académie royale de musique après seulement trois représentations. Trop de modernité ? L’ouvrage, il est vrai, fait preuve d’une forme inusitée : trois actes au lieu de cinq, suprématie du récitatif sur l’air, sans oublier l’éviction des divertissements au profit d’intermèdes. Mais c’est l’orchestre qui profite le plus de cette veine expérimentale, dont la puissance dramatique annonce déjà le grand opéra à la française de Cherubini. Il fallait toute la science de Christophe Rousset pour rendre justice à ces Horaces, défendus avec cœur par une distribution de haute volée, chœur et orchestre compris. Marie-Aude Roux

1 CD Aparté.

  • Igor Stravinsky
    Histoire du soldat

    Récitants et ensemble instrumental sous la direction de Jean-Christophe Gayot

Pochette de l’album « Histoire du soldat », d’Igor Stravinsky, par les récitants et l’ensemble instrumental sous la direction de Jean-Christophe Gayot. / HARMONIA MUNDI

Cent ans après sa création, Histoire du soldat « marche » toujours aussi bien sans le recours à la scène. Preuve en est donnée par cette merveille d’interprétation, qui dynamise avec un égal bonheur le texte de Ramuz et la musique de Stravinsky. Didier Sandre est un conteur-orchestre à l’aise sur tous les tons. Denis Podalydès, soldat plus vrai que nature, et Michel Vuillermoz, diable-caméléon, sortent tour à tour de leur boîte comme par magie. Emmené par le violon d’Olivier Charlier, idéalement entre deux cordes (celle du naturel et celle de l’artifice), l’ensemble instrumental, dirigé de main de maître par Jean-Christophe Gayot, nourrit l’imaginaire avec une efficacité aussi radiophonique que la prestation du trio de comédiens. Pierre Gervasoni

1 CD Harmonia Mundi.

  • Mylène Farmer
    Désobéissance

Pochette de l’album « Désobéissance », de Mylène Farmer. / STUFFED MONKEY / SONY MUSIC

Au début de l’année a été publiée la chanson Rolling Stone, présentée alors comme le premier single d’un nouvel album à venir de Mylène Farmer. L’attente aura duré neuf mois, jusqu’à la parution de Désobéissance, onzième album studio de la chanteuse, marqué par la collaboration avec le DJ et producteur Feder, qui, outre Rolling Stone, est au crédit de six autres des douze chansons du disque. Feder apporte à la chanteuse un son assez minimaliste dans le traitement des claviers comme des percussions et la production, aux orchestrations retenues. Ce renouvellement des climats musicaux (avec le très réussi Prière dans l’approche la plus extrême) sert des thèmes familiers (tourments et espérances du sentiment amoureux, mélancolie). La littérature est évoquée avec Au lecteur, poème de Baudelaire parlé d’une voix profonde avec un accompagnement épuré.

Moins convaincantes sont les deux collaborations avec la chanteuse Laura Pergolizzi, dont un duo sur N’oublie pas. Enfin, trois chansons, Désobéissance, Parler d’avenir et Retenir l’eau, ont été réalisées avec Leon Deutschmann. On y retrouve la manière des grandes heures de Mylène Farmer avec Laurent Boutonnat, voix chorale, cordes, orchestrations fournies, lisibilité de l’accroche rythmico-mélodique. Un univers agréablement connu, complémentaire à la part plus « expérimentale » de ce disque qui n’a pas dérouté les fans : en huit jours de commercialisation, ses ventes ont dépassé 100 000 exemplaires. Sylvain Siclier

1 CD Stuffed Monkey/Sony Music.

  • Angèle
    Brol

Pochette de l’album « Brol », d’Angèle. / VL RECORDS / UNIVERSAL

Très prometteur, un premier brelan de singles –  La Loi de Murphy, Je veux tes yeux, La Thune –, tous illustrés de clips malicieux, avait séduit par la façon dont Angèle, 22 ans, jouait des contrastes entre la délicatesse de son chant et un sens vachard de l’observation, entre l’acidulé de mélodies pop et l’assurance des musiques urbaines. Si quelques chansons (Balance ton quoi, Victime des réseaux…) du premier album de la Bruxelloise retrouvent cette douce insolence, quelque part entre les refrains de son père, le chanteur Marka, et la sombre ironie de son frère, le rappeur Roméo Elvis (en duo dans Tout oublier), trop de titres perdent ce tranchant au profit de textes et de musiques chroniquant trop platement vie sentimentale et environnement générationnel. On espère plus de Brol – « bordel », « bazar », en argot bruxellois – pour la suite de sa jeune carrière. Stéphane Davet

1 CD VL Records/Universal.

  • Cat Power
    The Wanderer

Pochette de l’album « The Wanderer », de Cat Power. / DOMINO

Serait-ce la maternité qui aurait conduit l’Américaine Chan Marshall, alias Cat Power, à un semblant de sérénité, voire de classicisme, sur son nouvel album ? Six ans après Sun, tentative electro-pop bancale, la chanteuse réputée ingérable s’offre un retour aux sources sans écorchures, réminiscences de la soul gospel de The Greatest et de l’indie folk épuré de You Are Free. Autoproduit, The Wanderer distille un souffle mystique élégant, un peu trop sage, mais qu’emporte cette voix parmi les plus expressives du rock. Doublé aux chœurs par la Californienne Lana Del Rey, l’enlevé Woman se détache, avec une reprise sensible du Stay de Rihanna et, surtout, Horizon, hommage émouvant de la chanteuse à sa famille. Franck Colombani

1 CD Domino.