Pourquoi la Macédoine veut-elle changer de nom ?
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La Parlement de Macédoine a voté vendredi 19 octobre le lancement du processus en vue de changer le nom du pays en République de Macédoine du nord, un premier pas pour mettre fin au différend qui l’oppose à la Grèce depuis 25 ans.

Selon un journaliste de l’Agence France-Presse présent sur place, 80 députés sur un total de 120 ont voté en faveur de la proposition du gouvernement, permettant d’atteindre la majorité requise des deux tiers.

« Un grand jour pour la démocratie à Skopje ! », a réagi sur Twitter le commissaire européen à l’élargissement, Johannes Hahn. Les responsables européens et américains avaient apporté un franc soutien au changement de nom, arguant qu’il s’agissait là d’une occasion unique afin d’arrimer la Macédoine aux pays occidentaux.

Adhésion à l’OTAN et l’UE

Depuis l’indépendance de cette ex-république yougoslave en 1991, la Grèce juge que le nom de Macédoine ne peut s’appliquer qu’à sa province septentrionale. Athènes explique que cette appellation appartient à son patrimoine historique et culturel et ne peut s’appliquer qu’à sa région autour de Thessalonique.

Un accord conclu en juin entre les premiers ministres macédonien Zoran Zaev et grec Alexis Tsipras prévoit donc de baptiser République de Macédoine du nord ce petit pays pauvre des Balkans. Cet accord doit ouvrir la voie à la levée du veto grec à l’adhésion de Skopje à l’OTAN et l’UE.

Le processus n’est pas achevé, car des amendements doivent désormais proposer d’incorporer le nouveau nom dans la Constitution. Un autre vote du Parlement sera par la suite nécessaire pour entériner ce changement.

Semaine de vifs débats

Mais, le premier vote de vendredi soir, intervenu à l’issue d’une semaine de vifs débats à Skopje, représente une victoire cruciale pour le social-démocrate Zoran Zaev, qui a dû se battre pour convaincre une dizaine de parlementaires du parti d’opposition de droite VMRO-DPMNE.

« Je veux dire merci à chaque député et particulièrement aux députés du VMRO-DPMNE qui ont placé les intérêts de l’Etat au-dessus des intérêts personnels et du parti malgré la pression inutile exercée sur eux », a réagi M. Zaev, ajoutant qu’il allait « garantir » leur sécurité.

Parmi ces membres de l’opposition se trouvaient trois députés qui avaient été libérés sous caution cette semaine. Ils doivent répondre de leur implication présumée concernant l’irruption dans le Parlement d’une centaine de manifestants le 27 avril 2017, lors de laquelle le sang avait coulé, y compris celui du premier ministre.

Celui-ci a refusé de dire s’il y avait eu des négociations pour leur éventuelle amnistie. « Personnellement, je pardonne chacun d’eux », a-t-il déclaré à des journalistes, sans développer.

Incertitude en Grèce

Zoran Zaev avait dit que s’il ne parvenait pas à obtenir la majorité des deux tiers lors du vote de ce vendredi il convoquerait des élections anticipées.

Le 30 septembre, un référendum sur le changement de nom a été largement boudé par les Macédoniens, deux tiers des électeurs inscrits n’ayant pas participé pas au vote. Le « oui » l’avait emporté à 90 %, mais cette forte abstention a constitué un revers pour le premier ministre et compliqué sa tâche pour faire accepter l’accord par les députés.

Pour que cet accord entre en vigueur, il doit également être entériné par le Parlement grec. Là encore, l’incertitude est de mise : le vote de ratification pourrait potentiellement faire chuter le gouvernement Tsipras, dont la coalition ne dispose que d’une courte majorité de 152 députés, dont 7 de l’ANEL (Grecs indépendants, souverainistes), sur 300.