Le ministre de l’intérieur Christophe Castaner lors des funérailles de l’officier de police Marlène Castang, le 19 octobre à Albi. / ERIC CABANIS / AFP

Contrôles migratoires, conditions de travail des policiers, violences dans les quartiers : Christophe Castaner dresse sa feuille de route de ministre de l’Intérieur dans un long entretien au JDD, en reprenant les chantiers clé ouverts par Gérard Collomb.

Sur la question migratoire, Christophe Castaner se dit « inquiet » de la situation à la frontière espagnole depuis quelques mois. Il va nommer un « coordonnateur sécurité », qui sera un haut fonctionnaire, pour « mieux organiser les contrôles et le dialogue avec les autorités espagnoles ». Depuis le début de l’année, « on a recensé en Espagne 48 000 entrées irrégulières en provenance du Maroc – soit une augmentation de 155 % ! » et « les non-admissions à la frontière franco-espagnole ont augmenté de près de 60 % dans les Pyrénées-Atlantiques par rapport à l’an passé », selon lui.

Le ministre revendique une « politique ferme contre l’immigration irrégulière ». « Un tiers des demandeurs d’asile en France ont été déboutés dans un autre pays d’Europe, c’est inadmissible. Nous n’avons pas vocation à être une instance d’appel des déboutés de l’Allemagne ou de l’Italie », ajoute-t-il.

Signaux envers les policiers

Il doit également échanger dans « les tout prochains jours » avec ses homologues européens, dont le ministre italien de l’intérieur Matteo Salvini. Ce dernier a envoyé samedi des policiers patrouiller à la frontière française afin d’empêcher les refoulements de migrants, au lendemain de la reconduite de trois clandestins, qualifiée de normale par la France.

« Dans la plupart des zones frontalières, la coopération avec la police italienne se passe bien. Je comprends qu’il y a un besoin de renforcer cette coopération dans la région de Bardonnèche. Ne comptez pas sur moi pour ajouter de la polémique à la polémique. »

Les relations entre Rome et Paris se sont tendu ces derniers mois. L’Italie accuse ses partenaires européens, à commencer par la France, de l’avoir laissée seule gérer la crise migratoire et les quelque 700 000 migrants arrivés sur ses côtes depuis 2013.

Le ministre nommé mardi – avec pour l’épauler un secrétaire d’Etat, l’ex patron du renseignement intérieur Laurent Nuñez – adresse également des signes à ses troupes et notamment aux policiers en rappelant la hausse de 3,5 % du budget de son ministère. Christophe Castaner reconnaît que les policiers « ont raison de (se) plaindre » de la vétusté de leur matériel, rappelant que 300 millions d’euros par an seront consacrés à la rénovation de l’équipement auxquels s’ajoutent 130 millions pour la rénovation de la flotte automobile.

« Reconquérir la souveraineté républicaine »

La Direction générale de sécurité intérieure (DGSI) sera, elle, dotée de 22,5 millions d’euros supplémentaires affectés à des investissements technologiques. Ses trois sites devraient également être réunis en un seul.

Mesure symbolique, Christophe Castaner veut également « mettre un terme » à « la protection à vie des anciens ministres de l’Intérieur » et la ramener à cinq ans après la fin de leurs fonctions. Lors de son départ fracassant, son prédécesseur Gérard Collomb avait évoqué la difficulté des quartiers et sa crainte que « nous vivions face à face » en France. Christophe Castaner reconnaît à son tour la « situation de tension extrême et une très grande violence dans certains quartiers ».

Il doit se rendre dimanche au commissariat de Champigny (Val-de-Marne), où des policiers se sont fait insulter sur une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux cette semaine. « Partout où l’on voit que la République recule, il faut agir. Reconquérir mètre carré par mètre carré la souveraineté républicaine dans certains quartiers. Ce sera un combat », ajoute-t-il.

Gérard Collomb a quitté le ministère pour se préparer aux élections municipales de Lyon. Son successeur affirme dans le JDD qu’il ne « sera pas candidat » aux municipales. Sur un autre chantier attendu, Christophe Castaner annonce qu’il présentera à Emmanuel Macron dans « quelques jours » les résultats de la consultation organisée dans chaque département sur l’organisation de l’Islam de France.