Les dernières révélations du consortium European Investigative Collaborations (ECI) sur les « Football Leaks » montrent que la tentation de contourner la règle du fair-play financier, qui interdit théoriquement à un club de football engagé dans une compétition européenne de dépenser plus qu’il ne dispose de recettes, est à l’évidence très grande. Après le PSG, accusé d’avoir surévalué certains contrats de sponsoring, c’est l’AS Monaco qui est accusée d’avoir cherché, en juin 2014, à gonfler ses recettes à l’aide d’un « montage offshore », via des sociétés écrans, à Hongkong et aux îles Vierges.

Selon le site Mediapart (qui fait partie de l’ECI), Monaco, qui s’était qualifié à l’issue de la saison 2013-2014 pour la Ligue des champions et avait besoin de nouvelles ressources, avait conclu un partenariat avec une agence de marketing, AIM Digital Imaging, « société offshore immatriculée à Hongkong ». Celle-ci était chargée de garantir « 140 millions d’euros de revenus pendant dix ans », si le club n’arrivait pas à dégager de telles ressources.

Selon les « Football Leaks », en octobre 2014, ce contrat « atypique » aurait été complété par « un accord d’investissement avec City Concept Ventures, une société écran immatriculée aux îles Vierges britanniques », censée de son côté « investir 140 millions d’euros par an dans AIM Digital Imaging ». Mediapart affirme que City Concept Ventures serait un « faux nez » du propriétaire de Monaco, le milliardaire russe Dmitri Rybolovlev, et lui permettrait d’injecter directement de l’argent dans son propre club, en contournant les règles du fair-play financier.

Dîner et accord à l’amiable

Si Monaco reconnaît avoir passé un contrat avec AIM, le club assure que l’agence « devait, en fait, trouver trente millions de ressources complémentaires ». La direction du club explique également que ce contrat « s’est avéré, malgré tout, trop ambitieux et irréalisable » et « n’a jamais été exécuté et (…) n’est jamais entré dans les comptes du club ». « Il n’a donc à aucun moment pu servir à être utilisé dans le cadre du fair-play financier », ajoute l’ASM, qui dément « fermement avoir contourné le fair-play financier ».

Selon les documents réunis par le consortium ECI, Monaco n’aurait, finalement, pas pu utiliser son « montage offshore » en raison d’une brouille entre Dmitri Rybolovlev et le patron d’AIM. Mais, auparavant, cela avait toutefois conduit le club à mener « une intense campagne de lobbying » auprès d’Andrea Traverso, le responsable du fair-play financier au sein de l’UEFA, notamment lors d’un « dîner au restaurant étoilé de Joël Robuchon à l’hôtel Métropole » de Monte-Carlo.

Cela n’a pas empêché la chambre d’instruction de l’UEFA d’ouvrir une enquête sur les déficits du club, pour condamner Monaco en mai 2015 à trois millions d’euros d’amende ferme, assortie d’une limitation de recrutement pendant un an. Selon le consortium de journaux européens, la chambre d’instruction aurait toutefois « choisi de fermer les yeux » sur le contrat litigieux avec AIM avec « cet accord amiable particulièrement clément ».

Mediapart cite un courriel adressé par Andrea Traverso à un conseiller des dirigeants monégasques : « C’est un accord très favorable comparé à ceux conclus avec d’autres clubs. Très loin de celui du PSG l’an dernier », précise le responsable du fair-play financier.