Carlos Ghosn, le 11 mai 2012. / TORU YAMANAKA / AFP

Carlos Ghosn n’est plus président de Nissan. Convoqué, jeudi 22 novembre, pour une séance extraordinaire, le conseil d’administration du constructeur japonais a approuvé la proposition du directeur général, Hiroto Saikawa, de le démettre de ses fonctions de président non exécutif du constructeur japonais.

Le conseil s’est prononcé à l’unanimité pour sanctionner le dirigeant de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, arrêté lundi 19 novembre pour malversations financières. Mitsubishi, également présidé par M. Ghosn, devrait prendre une décision similaire lors d’une réunion de son conseil d’administration, prévue la semaine prochaine. « M. Ghosn, temporairement empêché, demeure président-directeur général », a déclaré le conseil d’administration de Renault.

Au moment même où se réunissait le conseil d’administration de Nissan, une conférence de presse était organisée par le parquet de Tokyo, qui a entendu, depuis lundi, une dizaine de cadres de Nissan, dont M. Saikawa et Yoshiyuki Shiga, membre du conseil d’administration. Elle n’a guère apporté d’éclairages supplémentaires. Si le procureur adjoint, Shin Kukimoto, a bien confirmé que la garde à vue de M. Ghosn avait été prolongée de dix jours (soit jusqu’au 30 novembre), il a en revanche refusé de dire si le patron de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi avait reconnu ou non les faits de fraude financière qui lui sont reprochés.

De son côté, la presse nipponne est plus bavarde et a continué de distiller des révélations sur les malversations supposées de l’ex-patron de Nissan. Le journal The Asahi Shimbun rapporte, jeudi 22 novembre, que Carlos Ghosn a demandé par courriel à Greg Kelly de falsifier ses déclarations de revenus. Le parquet de Tokyo a probablement saisi ses e-mails et pourrait les utiliser comme preuves, ajoute le journal, qui cite des sources anonymes.

Les méthodes Nissan en question

TORU HANAI / REUTERS

Selon le Yomiuri, plus gros tirage de la presse japonaise, citant également des sources anonymes, l’enquête interne menée par Nissan a révélé que Carlos Ghosn avait demandé, depuis 2002, qu’une somme d’environ 100 000 dollars par an soit versée à sa sœur aînée, en rémunération d’une « activité de conseil » fictive.

La liste des griefs faits à M. Ghosn, accusé officiellement d’avoir minoré ses déclarations de revenus d’environ 5 milliards de yens (38,8 millions d’euros), s’allonge. Il aurait utilisé les avoirs de l’entreprise à des fins privées et détourné des investissements du groupe, afin d’acquérir des logements au Brésil, aux Pays-Bas, en France et au Liban. Selon le quotidien The Mainichi, Carlos Ghosn aurait également détourné à son profit une partie des rémunérations destinées aux membres du conseil d’administration. Soit un milliard de yens sur trois (7,5 millions d’euros sur 23).

Mais les critiques pleuvent aussi sur Nissan et ses méthodes. D’après la chaîne de télévision TBS, le constructeur n’avait pas de structure chargée de discuter des salaires des dirigeants. Carlos Ghosn fixait semble-t-il sa rémunération lui-même. Ces révélations questionnent sur l’« aveuglement » de Nissan et sur le rôle du cabinet d’audit Ernst & Young ShinNihon, déjà critiqué pour ne pas avoir vu les manipulations comptables chez Olympus et Toshiba, deux entreprises nippones également au cœur de scandales retentissants ces dernières années.

Lors de la conférence de presse donnée après l’arrestation de Carlos Ghosn, M. Saikawa avait prôné une refonte de la gouvernance de l’entreprise. Il avait notamment déploré « le pouvoir hyperconcentré dans les mains d’une seule personne ».