Une manifestante lors de la mobilisation du mouvement #Noustoutes le 29 septembre 2018, place de la République à Paris. / ZAKARIA ABDELKAFI / AFP

« Pour en finir avec les violences sexistes et sexuelles » : des dizaines de milliers de manifestantes et manifestants sont attendus partout en France, samedi 24 novembre, à l’appel d’un collectif citoyen, #NousToutes, qui espère un « raz-de-marée féministe » dans les rues, un an après la vague #MeToo.

Des défilés sont prévus dans une cinquantaine de villes (Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Lille, Nantes...) et se pareront de violet, couleur choisie par le mouvement #NousToutes. Ces derniers jours, sur les réseaux sociaux, les féministes - femmes et hommes - ont multiplié les messages à l’attention des « gilets jaunes », mobilisés également ce samedi, les exhortant de ne pas éclipser leurs marches.

« Cette mobilisation est inédite » dans son ampleur, a souligné, samedi matin sur France Inter, Caroline De Haas, l’une des instigatrices de ces marches. « D’habitude, on est quelques centaines, quelques milliers » à défiler à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes, le 25 novembre de chaque année. « Là on va être partout en France des dizaines de milliers de personnes », a assuré la militante féministe.

Du témoignage à l’action

A Paris, les féministes défileront à partir de 14 heures, de la place de l’Opéra à République, pour réclamer la fin de « l’impunité des agresseurs », ainsi que « des mesures ambitieuses et des moyens financiers suffisants pour que l’action publique mette la lutte contre les violences en top des priorités ».

Né en septembre et appuyé par plusieurs associations, le mouvement #NousToutes entend « passer du témoignage à l’action », un an après #MeToo, qui a fait bondir de 23 % le nombre de cas de violences sexuelles signalées à la police, et six semaines après la mobilisation d’un millier de femmes à Paris autour de Muriel Robin. La comédienne sera d’ailleurs de nouveau dans la rue samedi, aux côtés d’autres actrices comme Eva Darlan et Vanessa Demouy ou de la responsable CGT Sophie Binet.

En France, en 2016, 123 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-compagnon, soit environ une tous les trois jours. Chaque année, près de 220 000 femmes subissent des violences de la part de leur conjoint ou ex-compagnon, selon des chiffres officiels datant de 2017. En outre, plus de 250 femmes sont violées chaque jour, et une sur trois a déjà été harcelée ou agressée sexuellement au travail.

Il y a un an, le président Emmanuel Macron avait décrété l’égalité femmes-hommes « grande cause du quinquennat », lors d’un discours à l’Elysée. Mais « s’il n’y a pas d’argent, les politiques publiques ne suivront pas, a prévenu Caroline De Haas. En Espagne, ils ont sorti un milliard d’euros supplémentaire en cinq ans pour en finir avec les violences. En France, il faudrait deux milliards. ».

Les fonds consacrés à l’aide aux femmes victimes de violences conjugales devraient être portés à au moins 506 millions d’euros par an, contre 79 millions d’euros aujourd’hui, ont plaidé, le 22 novembre, cinq organisations, dont la Fondation des femmes, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) et le Conseil économique, social et environnemental (CESE).

Soutien de nombreuses personnalités

De nombreuses personnalités de la politique, des mondes associatif, culturel, médiatique ou syndical ont apporté ces derniers jours leur soutien à ces marches. Les écrivaines Marie Darrieussecq et Annie Ernaux, les comédiens Philippe Torreton et Karine Viard, les chanteurs Catherine Ringer, Jeanne Cherhal et Arthur H, ou encore la chroniqueuse et essayiste Rokhaya Diallo ou l’humoriste Guillaume Meurice ont ainsi signé une tribune, relayée lundi par Mediapart et France Inter.

Dans une autre tribune, publiée dans Le Monde, une quinzaine de responsables syndicaux, dont Laurent Berger (CFDT) et Philippe Martinez (CGT), ont également appelé à participer « pour dire stop aux violences sexistes et sexuelles que subissent les femmes au travail », un « angle mort » dans la société.

Une dizaine de célébrités masculines, dont les comédiens Philippe Katerine et Manu Payet ou l’humoriste Guillaume Meurice, ont participé à une vidéo diffusée depuis vendredi sur les réseaux sociaux. Dans ce clip, ils s’interrogent sur la manière dont les hommes réagiraient s’ils vivaient dans un monde où des violences sexuelles étaient couramment commises à leur encontre par des femmes.

Manu Payet et d'autres hommes lancent un appel pour la marche du 24 novembre
Durée : 01:24

Espace non-mixte

La gent masculine sera cependant exclue d’un « petit espace non-mixte » pour rassurer des « femmes victimes de violences diverses qui ne se sentaient pas à l’aise à l’idée de défiler avec des hommes autour d’elles », selon Marion Schaefer, coorganisatrice de #NousToutes. L’initiative a été critiquée sur les réseaux sociaux, y compris par des militantes féministes.

Certaines organisations refusent de marcher aux côtés des féministes de #Noustoutes, sur la base de certains principes qu’elles jugent battus en brèche par ces dernières. C’est le cas notamment de l’association Femmes solidaires, qui fédère plus d’une centaine d’associations locales. Revendiquant un féminisme universaliste, et rappelant sa position abolitionniste sur la prostitution, elle a envoyé un communiqué pour se désolidariser.

Des tribunes pour accompagner la marche contre les violences faites aux femmes

Le collectif #noustoutes organise samedi 24 novembre une marche contre les violences faites aux femmes. Syndicalistes, médecins, psychiatres et avocats les soutiennent.