2 000 étudiants se sont rassemblés devant les locaux de Campus France, jeudi 6 décembre, pour protester contre la hausse des frais d’inscription pour les étudiants non-européens. / Alice Raybaud via Campus

Certains avaient des guirlandes autour du cou et des masques indiquant « Macron, on sera pas ton père Noël ». Ce jeudi 6 décembre, à Paris, environ 2 000 étudiants s’étaient rassemblés pour manifester contre la hausse des frais universitaires pour les étudiants étrangers extra-européens.

A partir de la rentrée 2019, ceux-ci devront s’acquitter de 2 770 euros en licence et 3 770 euros en master, contre 170 euros pour une année de formation en licence, 243 euros en master pour les jeunes européens. Une décision présentée par le gouvernement comme une manière de développer les ressources des universités, et de renforcer leur attractivité.

Le rassemblement, qui devait à l’origine rester statique devant l’agence de promotion de la mobilité internationale Campus France, dans le 10e arrondissement, s’est transformé en manifestation vers 15 h 30. Le cortège improvisé a descendu dans le calme le quai de Valmy en direction de la place de la République puis de la Bastille.

« Obligée de quitter la fac sans diplôme »

« Université sans frontière ! », lançaient des étudiants des universités Paris 8, Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Paris Diderot. Parmi eux, Zara, étudiante algérienne en France depuis deux ans. Elle a repris ses études pour suivre une licence d’administration économique et sociale à l’université Paris 1.

Si la mesure s’applique, elle, comme plusieurs autres de ses camarades, n’auront d’autre choix que de « quitter la fac sans diplôme ». « Cette annonce va totalement à l’encontre des principes de la France et des droits de l’homme, et d’une éducation gratuite pour tous », pointe la jeune femme de 31 ans. « Aujourd’hui, la fac ne serait plus accessible qu’aux riches ? Il faudrait qu’ils se souviennent que les pauvres aussi ont de bonnes idées », lâche-t-elle, amère.

Le rassemblement devant les locaux de Campus France s’est transformé en manifestation et les étudiants se sont engagés sur le quai de Valmy. / Alice Raybaud via Campus

Micro à la main, Rachel (le prénom a été modifié), confie son « angoisse ». Marocaine sans papier en France depuis deux ans, l’étudiante en philosophie à Paris 1 est formelle : « S’il y a une hausse des frais, on est foutus. On travaille déjà à droite et à gauche pour seulement se loger ou se nourrir, comment pourrions-nous faire pour payer plus ? »

« Solidaires avec les “gilets jaunes” »

Dans le cortège, beaucoup vont jusqu’à parler d’une mesure « raciste », comme Tomek, 20 ans, étudiant français en deuxième année de philosophie à Tolbiac : « Cette réforme va pénaliser principalement les étudiants d’Afrique ou d’Amérique latine qui n’auront pas les moyens de payer des frais exorbitants. » Pour ce jeune, « le gouvernement continue dans la même logique que la réforme de Parcoursup, avec cette fois une sélection sociale pour favoriser les étudiants étrangers les plus riches. » Il fait partie de la poignée de manifestants qui, ce jour-là, portent un gilet jaune, en « solidarité » avec le mouvement social qui secoue le pays depuis trois semaines.

« On en a marre que ce soient toujours les mêmes qui trinquent », Alais

Si tous ne disent pas manifester en soutien des « gilets jaunes », on entend régulièrement, au cours de la manifestation, des slogans en faveur du mouvement : « Étudiants, “gilets jaunes”, même Macron, même combat. » Athéna, une jeune française en première année de science sociale à la Sorbonne, se dit favorable à cette convergence des luttes. « Nous sommes les enfants de cette classe populaire dont les “gilets jaunes” dénoncent le délaissement », explique la jeune femme de 19 ans, qui travaille « presque à temps plein » dans un pressing pour payer ses études.

« On en a marre que ce soient toujours les mêmes qui trinquent », s’insurge à ses côtés Alaïs, étudiante dans le même cursus. Quant à rejoindre les « gilets jaunes » samedi prochain, la jeune fille hésite encore, rebutée par les violences qui ont éclaté lors de la manifestation du 1er décembre sur les Champs-Elysées. Athéna, elle, a pris sa décision : elle sera présente à leurs côtés dans trois jours.