Le 18e comité des signataires de l’accord de Nouméa, le 14 décembre à Matignon. / STÉPHANE DE SAKUTIN / AFP

C’était attendu et il n’y a pas eu de surprise. Le 18e comité des signataires, chargé du suivi de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, a accouché, vendredi 14 décembre, d’un accord minimal… pour constater qu’il n’y avait pas d’accord. « Cela s’est passé le moins mal possible », dit, satisfait, Philippe Gomès, au nom de Calédonie ensemble (droite modérée). « On a acté les désaccords sur le plan politique », résume Sonia Backès, la cheffe de file des Républicains calédoniens.

Six semaines après le référendum du 4 novembre, qui a vu le non à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie l’emporter par 56,7 %, contre 43,3 %, le rapprochement des positions était illusoire, alors que doivent se tenir le 12 mai 2019 – la date a été arrêtée lors de cette réunion – les élections provinciales qui décideront de la majorité au Congrès et, par voie de conséquence, au gouvernement du territoire.

Du côté du « front loyaliste » (le Rassemblement-Les Républicains, Les Républicains calédoniens et le Mouvement populaire calédonien), la nette victoire du non rend caduc l’accord de Nouméa, qui prévoit la convocation d’un deuxième puis, éventuellement, d’un troisième référendum, espacés chaque fois de deux ans, si un tiers des membres du Congrès le demande. De son côté, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) estime que l’accord de Nouméa doit continuer à s’appliquer jusqu’à son terme. Deux positions inconciliables en l’état actuel.

Pour le président du groupe Union calédonienne-FLNKS du Congrès, Roch Wamytan, qui avec sa délégation a quitté la réunion à la mi-journée, estimant que les questions économiques qui devaient être abordées dans l’après-midi étaient du seul ressort des élus territoriaux, « l’accord de Nouméa a un début, 1998, et une fin, après les deuxième et troisième référendums ». « Donc, poursuit-il, la question des deuxième et troisième référendums n’a pas à être discutée, pas plus que celle de l’ouverture du corps électoral. »

Les élections provinciales en mai, un test majeur

Les indépendantistes s’appuient sur l’avis du Conseil d’Etat du 4 septembre, selon lequel « il résulte de l’accord lui-même que son application pourrait s’étendre au-delà de cette période [de vingt ans] ». Le gouvernement a confirmé au cours de ce comité des signataires qu’il en faisait une lecture identique. « Notre objectif était de réaffirmer que l’accord de Nouméa doit continuer à s’appliquer de manière pleine et entière. Nous sommes satisfaits de la position du gouvernement », s’est félicité Victor Tutugoro au nom de la délégation de l’Union nationale pour l’indépendance.

Il faudra donc attendre le verdict des urnes, en mai, pour espérer le début d’une amorce de reprise du dialogue. La ministre des outre-mer, Annick Girardin, veut croire qu’il n’est pas rompu et qu’il pourra reprendre après les provinciales, « pour travailler sur un nouvel accord si c’est une volonté partagée ». C’est la volonté, également, de Calédonie ensemble, qui fait toujours le « pari de l’intelligence ». « Le pari de l’intelligence, c’est intégrer que 57 ont gagné et que 43 doivent être écoutés, plaide Philippe Gomès. Construire un accord d’avenir partagé, certes c’est un chemin de crête. Le consensus ne s’impose jamais, il faut aller le chercher, mais nous devons nous montrer à la hauteur de nos anciens. »

Les élections provinciales seront donc un nouveau test politique majeur pour le territoire. Elles permettront de mesurer, à la fois, les rapports de forces au sein de la droite loyaliste et si les indépendantistes parviennent à concrétiser dans ce scrutin la dynamique du référendum. Les positions acquises à l’issue de ces élections détermineront en grande partie l’avenir du processus de décolonisation et les conditions dans lesquelles pourront reprendre les discussions.

Nouvelle-Calédonie : la dernière colonie française
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