RMC Story, vendredi 21 décembre à 20 h 55, série

Le projet d’Un village français était très ambitieux, et d’un type nouveau. Ses créateurs, Frédéric Krivine, Philippe Triboit et Emmanuel Daucé, en 2009, espéraient, sans trop y croire, qu’on leur laisserait le temps de réaliser pas moins de cinq saisons pour reconstituer la vie d’une petite ville fictive, Villeneuve, pendant les cinq années de l’Occupation. Leur pari est plus que gagné : cette monumentale production était devenue une référence en matière de séries historiques avant même la diffusion de sa septième et dernière saison, à l’automne 2017.

« Notre intention, dès le départ, était d’évoquer les 95 % de Français qui n’ont été ni résistants ni collabos, indiquait Emmanuel Daucé lors du lancement de la série. Nous nous sommes donc posé la question de la représentation sociologique de la population pour créer les personnages, en nous concentrant finalement sur les personnes les plus impliquées dans la société, afin de disposer de ressorts de dramatisation et ne pas confronter le téléspectateur qu’à du neutre”. »

Pas question que l’époque prenne le dessus, a expliqué Philippe Triboit, le réalisateur. « Décors, costumes, reconstitutions ne devaient pas l’emporter sur les personnages. Nous avons voulu montrer une époque sans que cela se voie, c’est-à-dire à hauteur d’yeux de personnages pris dans le chaos de l’Occupation. » Ce parti pris originel avait tellement enthousiasmé l’historien spécialiste de cette période Jean-Pierre Azéma qu’il a suivi chaque étape de cette production, des aspects historiques jusqu’à l’évolution de la vie privée des personnages.

Robin Renucci (au premier plan à gauche) incarne Daniel Larcher dans la série « Un village français ». / CHARLOTTE SCHOUSBOE

« Cette approche est très efficace pour penser l’Occupation, a-t-il expliqué. Elle respecte deux éléments essentiels pour comprendre les choix des Français moyens durant ces années noires : l’ambivalence des réactions, des attitudes, des appréciations, et le respect de la chronologie. On suit des personnages dans des cheminements qui sont personnels mais que l’historien analyse en termes plus généraux. Des hommes et des femmes ont eu des discussions, des problèmes financiers ou familiaux, des expériences religieuses ou militantes, ont vécu des amours, etc., qui les poussaient dans telle ou telle voie qui n’avait pas forcément le sens clair que nous lui imposons rétrospectivement. »

Une fresque romanesque

Pour sa part, la situation géographique de Villeneuve, où se concentrent toutes les intrigues, ne doit rien au hasard. Elle a pour modèle une ville bien réelle et bien étudiée par les historiens : Dole, dans le Jura, terre de passeurs et de maquis. Ce qui induit un mode de résistance intérieure propre à ce type de ville rurale, coincée en deçà de la ligne de démarcation toute proche, mais non loin de Sochaux-Montbéliard et de la Suisse, et donc propice à faire passer vers la zone libre des juifs chassés du nord de l’Europe.

Loin des séries « de guerre », Un village français propose une fresque romanesque dans laquelle des personnages « tout-venant » se retrouvent confrontés à un contexte historique exceptionnel – le couple d’instituteurs, le médecin, une fermière, le patron d’une petite entreprise, un enfant, un policier, etc. Des personnages qui vous restent à jamais en tête, d’autant qu’ils sont tous interprétés par d’excellents comédiens.

Un Village Français - Bande Annonce Saison 1
Durée : 00:40

Un village français, saison 1, série créée par Frédéric Krivine, Philippe Triboit et Emmanuel Daucé. Avec Robin Renucci, Audrey Fleurot, Thierry Godard, Nade Dieu (Fr., 2009, 6 × 60 min). www.numero23.fr