Le président turc Recep Tayyip Erdogan a invité son homologue américain Donald Trump à se rendre en Turquie, alors qu’Ankara et Washington resserrent leurs relations afin de coordonner le retrait attendu des troupes américaines en Syrie.

La Maison Blanche a annoncé lundi 24 décembre au soir que M. Erdogan avait invité M. Trump à venir en visite en 2019 en Turquie.

« Bien que rien de définitif ne soit en train d’être programmé, le président [Trump] est ouvert à une rencontre potentielle à l’avenir », a indiqué Hogan Gidley, un porte-parole de l’exécutif américain.

En attendant, « une délégation américaine va venir en Turquie cette semaine », avait déclaré plus tôt à la presse le porte-parole de la présidence turque Ibrahim Kalin. « Ils discuteront des moyens de coordonner [le retrait] avec leurs homologues turcs ».

« Eviter un vide du pouvoir »

Après un entretien téléphonique dimanche entre Donald Trump et Recep Tayyip Erdogan, la présidence turque a affirmé que les deux dirigeants avaient « convenu d’assurer la coordination entre les militaires, les diplomates et d’autres responsables de leurs pays pour éviter un vide du pouvoir qui pourrait résulter d’une exploitation du retrait [américain] et de la phase de transition en Syrie ».

Sur Twitter, M. Trump a dit avoir évoqué avec le numéro un turc « l’EI, notre engagement mutuel en Syrie et le retrait lent et extrêmement coordonné des troupes américaines de la région » ainsi que des relations commerciales « considérablement accrues ».

M. Kalin a en outre expliqué que le retrait américain attendu n’aurait pas d’impact sur la lutte contre le groupe djihadiste Etat islamique (EI) dans le nord de la Syrie. « Il n’y aura pas d’interruption dans la lutte contre l’EI. La Turquie montrera la même détermination contre l’EI. Il est hors de question de ralentir notre lutte contre l’EI » a-t-il dit.

Il a aussi assuré que la Turquie n’avait pas besoin dans cette lutte des milices kurdes des YPG appuyées par Washington mais qu’Ankara considère comme « terroristes » car émanant du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). « Pour battre l’EI, en tant que Turquie, nous n’avons pas besoin du PKK ou des YPG », a-t-il affirmé.

« Comme nous n’avons pas laissé les Arabes syriens en proie à Daech [l’EI], nous ne laisserons pas les Kurdes syriens en proie à la cruauté du PKK et des YPG », a déclaré M. Erdogan lors d’un discours à Ankara. « Pourquoi sommes-nous actuellement en Syrie ? Pour que nos frères arabes et kurdes recouvrent leur liberté », a-t-il ajouté.

Renforts à la frontière

Renforçant la pression sur les YPG, désarçonnées par l’annonce de l’imminent retrait de leurs alliés américains, la Turquie a acheminé lundi de nouveaux renforts militaires à sa frontière avec la Syrie en préparation de l’offensive qui se profile, même si M. Erdogan a décidé d’y surseoir dans l’immédiat.

Des unités militaires, des canons de type Howitzer et des batteries d’artillerie ont été acheminés en convoi vers le district Elbeyli, face à la frontière syrienne dans la province turque de Kilis, selon l’agence étatique Anadolu. Cet envoi de renforts avait commencé ce week-end avec l’arrivée d’une centaine de véhicules militaires turcs dans la région d’al-Bab, contrôlée par des forces pro-turques dans le nord de la Syrie, a indiqué le quotidien Hürriyet. Des renforts militaires ont également été dépêchés vers la ville d’Akcakale et le district de Ceylanpinar dans la province de Sanliurfae (sud-est de la Turquie).

Prenant de court les alliés de Etats-Unis, M. Trump a ordonné mercredi le départ dès que possible des quelque 2 000 militaires américains stationnés dans le nord-est de la Syrie où ils luttent contre les jihadistes aux côtés des Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition de milices arabo-kurdes dominée par les YPG. Le président, opposant de longue date à la présence américaine dans un conflit jugé coûteux, a estimé que les troupes américaines n’étaient plus utiles car l’EI était « en grande partie vaincu ».

Et il semble compter sur M. Erdogan pour en finir. « Le président Erdogan de Turquie m’a donné des assurances dans des termes très forts » quant au fait qu’il allait « éradiquer ce qui reste de l’EI en Syrie », a-t-il ainsi tweeté.

D’après le Washington Post citant des sources à la Maison Blanche, les conseillers de Donald Trump l’ont persuadé de retirer plus lentement qu’il ne l’aurait voulu les troupes américaines afin que leur sécurité ne soit pas menacée.