Le procès controversé d’Abdelali Hamieddine, un haut responsable du Parti justice et développement (PJD, islamiste) qui mène la coalition gouvernementale au Maroc, s’est ouvert, mardi 25 décembre, à Fès, dans le nord du pays.

Un important dispositif policier était mobilisé aux abords de la cour d’appel. Le procès, qui a débuté en présence de dizaines de personnes venues soutenir la partie civile et le dirigeant islamiste, a rapidement été renvoyé au 12 février 2019, ont rapporté des médias locaux.

« Principes élémentaires du droit »

Le haut responsable du PJD est poursuivi dans une affaire pour laquelle il avait déjà été jugé en 1993 : des affrontements entre étudiants islamistes et de gauche avaient à l’époque entraîné la mort d’un de ces derniers, Mohamed Ait Ljid. Abdelali Hamieddine, qui étudiait alors à l’université de Fès, avait été condamné à deux ans de prison pour « participation à une rixe au cours de laquelle sont exercées des violences ayant entraîné la mort ».

En juillet 2017, des proches de la victime ont déposé une nouvelle plainte. Et le juge d’instruction a décidé il y a quelques semaines de poursuivre le responsable islamiste, en requalifiant les faits, pour « participation à un homicide volontaire ».

« Ce procès n’a pas lieu d’être. Hamieddine a déjà été jugé, et cette décision judiciaire est définitive », a argué mardi l’un de ses avocats, Abdessamad Idrissi, peu avant l’ouverture du procès. « Selon les principes élémentaires du droit, on ne peut condamner une personne à deux reprises » pour les mêmes faits, a-t-il noté.

« Il faut laisser la justice faire son travail », a rétorqué l’un des avocats de la partie civile, Jaouad Benjelloun Touimi.

Tollé chez les magistrats

Le PJD a exprimé son « soutien unanime » à M. Hamieddine, et le chef du gouvernement, Saad-Eddine Al-Othmani, qui en est issu, a qualifié d’« incompréhensible » la décision du juge d’instruction. Le ministre d’Etat chargé des droits de l’homme (et ex-ministre de la justice), Mustapha Ramid, autre figure du PJD, s’est également exprimé de façon très tranchée sur le sujet, soulevant un tollé chez les magistrats qui dénoncent une atteinte à l’indépendance de la justice.

Comme d’autres caciques du parti islamiste, l’ex-chef du gouvernement Abdelilah Benkirane était présent mardi à la cour d’appel de Fès pour apporter son soutien à Hamieddine, dont il est réputé très proche.

L’université de Fès a par le passé été à maintes reprises le théâtre de heurts entre des étudiants islamistes et des militants de la gauche radicale. En avril 2014, de violents affrontements avaient fait un mort parmi ces derniers.