Parfois la magie de Noël opère même en politique. Juste avant les vacances, un drôle de déjeuner s’est tenu près de l’Assemblée nationale. Il devait être secret et réunissait quatre convives rarement ensemble : Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de La France insoumise (LFI) ; Emmanuel Maurel, ancien socialiste devenu « insoumis » ; l’essayiste Raphaël Glucksmann et l’économiste Thomas Porcher, qui ont lancé avec Claire Nouvian, militante écologiste, le mouvement Place publique, qui veut notamment œuvrer à l’unité de la gauche pour les élections européennes de mai 2019.

Un plan de table surprenant puisque les relations entre MM. Mélenchon et Glucksmann étaient jusqu’à présent à couteaux tirés. L’auteur des « Enfants du vide » (Allary éditions, 2018), qui a conseillé Benoît Hamon lors de la campagne présidentielle de 2017, représente une famille politique héritière de la deuxième gauche (décentralisatrice, pro-européenne et écologiste), qui diffère en plusieurs points du mouvement de M. Mélenchon qui se réclame du populisme de gauche et de l’écosocialisme. En revanche, M. Porcher, lui, ne cache pas avoir voté pour le candidat « insoumis » et a assuré dans un entretien au Monde que Place publique « ne s’inscrivait pas contre Jean-Luc Mélenchon ». De quoi détendre l’atmosphère.

« Ambiance très détendue »

D’ailleurs, la discussion autour de la table aurait été « conviviale, sympathique et bienveillante », l’ambiance « très détendue ». Au menu, pas d’accord secret pour une liste d’union (le sujet n’aurait pas été abordé) mais des débats de fond, sur la gauche, les « gilets jaunes », et l’Europe, histoire de souligner les divergences (notamment sur le rôle des pays de l’Est au sein de l’Union européenne) et les convergences entre ces deux gauches qui ne veulent pas être irréconciliables.

Cette rencontre intervient, en tout cas, dans un moment de doute à gauche, à un peu plus de cinq mois des européennes. Place publique veut être le catalyseur d’une liste d’union et rencontre tous les acteurs à cet effet. Pour l’instant, seul le PS semble vraiment intéressé par la démarche tandis que Génération.s de Benoît Hamon fait monter les enchères.

LFI, quant à elle, a toujours été claire sur son refus des « soupes de logos » et de la stratégie d’union de la gauche, qu’elle estime non seulement dépassée mais surtout mortifère. Selon les « insoumis », il faut « fédérer le peuple », mener un combat contre « l’oligarchie » incarnée aujourd’hui par Emmanuel Macron. Deux visions divergentes, donc, mais qui n’empêchent pas de se parler.