Arte, vendredi 28 décembre à 20 h 55, téléfilm

Les costumes sont magnifiques, les décors des palais tchèques dans lesquels a été tournée cette ambitieuse superproduction d’Europe de l’Est également. Placées sous la direction du réalisateur Robert Dornhelm, les équipes techniques ont soigné les détails : somptueuses images, visages expressifs de personnages en perruque filmés en gros plan, pénombre propice aux complots, musique entraînante, voilà le téléspectateur plongé au cœur du XVIIIe siècle, et plus précisément du palais de la Hofburg, à Vienne, centre névralgique de la maison des Habsbourg. Mais si Vienne est au cœur de l’action, plusieurs scènes de ce téléfilm scindé en deux parties font voyager : à Prague, Budapest, Florence ou Presbourg (aujourd’hui Bratislava).

Intrigues de cour, alliances contre nature, histoires de cœur et de pouvoir, cette production austro-hungaro-tchéco-slovaque rend, de fait, hommage à une femme sortant de l’ordinaire : Marie-Thérèse d’Autriche, née et décédée à Vienne (1717-1780), surnommée de son vivant « la Grande » et dont Voltaire parlait comme d’une « grande femme qui excelle dans l’utile et l’agréable ». De 1745 à 1780, Marie-Thérèse régna sur l’immense et déjà fragile empire austro-hongrois, qui s’étendait du sud de la Pologne à la Méditerranée. Pour interpréter ce personnage complexe qui, sans renoncer à son rôle de mère et d’épouse, s’imposa comme une femme de pouvoir dans un univers de mâles peu enclins à perdre de leur influence, le choix de Marie-Luise Stockinger s’est révélé judicieux.

Fougue et doutes

La jeune comédienne (26 ans), membre de la prestigieuse troupe du Burgtheater de Vienne depuis 2015, incarne à merveille une Marie-Thérèse pleine de fougue mais aussi de doutes. Passant avec aisance de femme-enfant à archiduchesse sans faiblesse, Marie-Luise Stockinger a le physique de l’emploi : grands yeux bleus, moue boudeuse et sexy, voix cassée, elle est le pouvoir qui séduit, décide et frappe. Mais pas seulement. Ses rapports tendus avec sa mère, ses relations conjugales avec François-Etienne, duc de Lorraine, sa complicité avec sa sœur, ses tentatives de sauver l’empire des multiples menaces, qu’elles soient prussiennes, hongroises, ottomanes, bavaroises ou françaises, sont longuement analysées au cours de scènes intimistes réussies.

En choisissant de retracer l’adolescence de Marie-Thérèse lors de la première partie puis sa tumultueuse première année de règne, le téléfilm frappe juste. Même lorsqu’elle n’est pas encore sur le trône, son caractère bien trempé apparaît. Dans la seconde partie, la jeune femme, qui vivait heureuse à Florence avec sa famille, est rappelée par les dures réalités viennoises. Son père, l’empereur Charles VI, décède subitement en octobre 1740. En l’absence d’enfant mâle et afin d’affirmer l’indivisibilité des domaines des Habsbourg, il avait, en 1713, imposé la « Pragmatique Sanction », qui réservait le trône à l’aîné vivant des enfants, quel qu’en soit le sexe. Voici donc Marie-Thérèse sur le trône. Elle y restera près de quarante ans. Durant son règne, elle mènera deux guerres. L’une des scènes les plus frappantes montre une fosse commune dans laquelle les uniformes des soldats autrichiens tués sont recouverts de chaux. Toute l’horreur de la guerre en une seule image, aérienne et silencieuse.

Maria Theresia - Trailer [HD] Deutsch / German
Durée : 01:40

Marie-Thérèse d’Autriche, de Robert Dornhelm (90 et 112 min). www.arte.tv