L’avis du « Monde » – pourquoi pas

Le temps passe et voilà que Charles Berling, 60 ans, a le physique pour jouer un policier qui prend sa retraite. Parisien, veuf et célibataire, le commissaire Beffrois n’attend rien d’autre qu’un peu de temps libre. Ses deux fils « de gauche » ont souvent moqué ce père membre des forces de l’ordre. Mais Beffrois a pris du recul, sur son métier, sur les voleurs et leur risque de se faire prendre, surtout s’ils ont la peau noire. Il y a des délinquants qui s’en sortent mieux que d’autres dans le premier long-métrage de Lucas Bernard, ancien assistant opérateur de Tonie Marshall et de Coline Serreau, et chef opérateur de René Féret sur Anton Tchekhov 1890 (2015). Un beau voyou oscille entre le film policier et la comédie loufoque, avec une dose de sociologie de classes. Lucide mais un brin simpliste.

Le film commence ainsi. Rentrant chez lui, Beffrois surprend un jeune Noir (Alassane Diong) qui lui fait les tiroirs. « T’oublieras pas d’être blanc ! », lui dit-il, pas fâché, en le raccompagnant à la porte. Le voleur, en liberté conditionnelle, vient de lui expliquer comment il récupérait les codes d’entrée d’immeubles quand il travaillait dans l’électroménager…

Manque de profondeur

La veille de son pot de départ à la retraite, Beffrois se rend dans un bel appartement pour constater un vol de tableau. Du beau travail : intrigué, le commissaire ne peut s’empêcher de mener l’enquête, même quand il aura rendu son arme. D’ateliers d’artiste en immeubles haussmanniens, il rencontre une restauratrice de tableaux, Justine (Jennifer Decker de la Comédie-Française), et son amoureux Bertrand, jeune homme de bonne famille au regard inquiet, incarné par Swann Arlaud – révélé dans Petit paysan (2017), d’Hubert Charuel. On sait peu de chose sur Bertrand, mais rassurons-nous : sa copine et ses parents non plus. On peine à y croire, et ce n’est pas la seule facilité de ce scénario.

Voici le commissaire confronté à un milieu de l’art qu’il a effleuré dans le passé. Il sait reconnaître un Rothko ou un Opalka. Pour le reste, il se sent à côté de la plaque comme l’était Jean-Pierre Bacri dans Le Goût des autres (2000). Mais Charles Berling n’est pas le plus convaincant quand il joue le « plouc » face à un tableau. Il est meilleur dans la peau du commissaire largué, fasciné, voire touché par ce voleur bien né, un écorché vif que personne n’imagine cagoulé sur les toits. Mais il manque de la profondeur à ce « beau voyou » pour qu’il s’incarne réellement. Le premier long-métrage de Lucas Bernard raconte surtout l’histoire d’un drôle de flic.

Un Beau Voyou bande annonce, sortie le 02/01/2019
Durée : 01:44

Film français de Lucas Bernard. Avec Charles Berling, Swann Arlaud, Jennifer Decker (1 h 44). Sur le Web : distrib.pyramidefilms.com/pyramide-distribution-catalogue/un-beau-voyou.html