Paul Whelan, 48 ans, est détenu près de Moscou depuis le 28 décembre. / FAMILY HANDOUT / AFP

Dans un contexte diplomatique déjà lourd entre Moscou et plusieurs pays occidentaux, les services de sécurité russes (FSB) ont annoncé, lundi 31 décembre, détenir un citoyen américain accusé d’« acte d’espionnage ». Paul Whelan, 48 ans, avait été arrêté trois jours plus tôt dans la capitale russe. En détention provisoire dans l’attente de son procès, il encourt jusqu’à vingt ans d’emprisonnement.

Né au Canada, mais détenant la nationalité américaine, britannique et irlandaise, Paul Whelan est un ancien soldat de la Marine américaine, devenu directeur de la sécurité internationale du groupe BorgWarner, un fabricant international de pièces détachées dans le secteur automobile. « Paul Whelan est notre frère et fils (…). Nous sommes très inquiets pour sa sécurité et sa santé. Son innocence ne fait aucun doute et nous espérons que ses droits seront respectés », a déclaré son frère David Whelan dans un communiqué au nom de la famille, publié sur son compte Twitter.

Accusé d’avoir essayé de recruter un citoyen russe

Paul Whelan a été arrêté alors qu’il assistait, à Moscou, au mariage d’un ancien collègue, retraité de la Marine comme lui, avec une Russe. L’agence de presse Rosbalt, réputée proche du FSB, a cité une source anonyme des renseignements russe selon laquelle M. Whelan était accusé d’avoir essayé de recruter un citoyen russe pour obtenir des informations classifiées concernant des membres de différentes agences étatiques du pays.

Il aurait été arrêté, toujours selon Rosbalt, cinq minutes après avoir reçu « une clé USB contenant une liste confidentielle de tous les employés d’une agence de sécurité russe », relate le New York Times, qui retrace le profil de Paul Whelan. Condamné en cour martiale en 2008 aux Etats-Unis pour vol et escroquerie, il possède un profil sur un réseau social russe affichant la photo de son chat ou des références aux jours fériés russes et canadiens. Face à ces accusations, la CIA s’est dite sceptique quant au fait que Paul Whelan puisse être un espion.

L’ambassadeur des Etats-Unis à Moscou, Jon Huntsman, lui a rendu visite mercredi à la prison de Lefortovo, dans la capitale russe, selon le département d’Etat américain. Les représentants britanniques et irlandais en Russie ont eux aussi fait une demande d’accès consulaire au détenu, un droit diplomatique prévu depuis la convention de Vienne.

Vendredi, le secrétaire d’Etat britannique aux affaires étrangères, Jeremy Hunt, a mis en garde Moscou contre le fait que « des personnes soient utilisées dans un jeu d’échecs diplomatique ». « Nous sommes tous très inquiets pour lui et sa famille », a-t-il ajouté sur la BBC, en précisant que le Royaume-Uni n’avait pas encore obtenu l’accès consulaire à M. Whelan.

Déjà tendues, les relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et la Russie se sont envenimées depuis l’empoisonnement d’un ex-agent double russe et de sa fille en Angleterre en mars 2018. Cette attaque a été attribuée par le Royaume-Uni, appuyé par ses alliés occidentaux, à la Russie, qui nie les faits. L’épisode a entraîné une crise diplomatique, ainsi que la plus importante vague d’expulsions croisées de diplomates russes et occidentaux de l’histoire.

Côté américain, l’arrestation de Paul Whelan intervient moins d’un mois après qu’une citoyenne russe, Maria Butina, a admis devant une cour fédérale faire partie d’un lobby organisé et appuyé par des officiels russes pour influencer les décisions du parti républicain en passant par la National Riffle Association (NRA), principale organisation du lobby des armes aux Etats-Unis.