Christophe Dettinger, à droite, lors d’une manifestation des « gilets jaunes », samedi 5 janvier à Paris. / GONZALO FUENTES / REUTERS

« Une prime à casser du flic », « une énième provocation », une « cagnotte indigne ». Les critiques se sont multipliées, mardi 8 janvier, après la mise en ligne d’une cagnotte de soutien à l’ancien boxeur Christophe Dettinger, soupçonné d’avoir agressé deux gendarmes à Paris lors de la manifestation samedi des « gilets jaunes ».

Cette cagnotte, qui se présente comme « officielle », affichait plus de 117 000 euros mardi matin vers 8 h 30 – une somme destinée à soutenir Christophe Dettinger, qui s’est rendu à la police lundi matin. Face à la polémique, la plate-forme Leetchi, qui hébergeait la cagnotte, a décidé de la clôturer à la mi-journée. Dans un communiqué, Leetchi « s’engage à ce que les fonds collectés sur la cagnotte de soutien à Christophe Dettinger servent uniquement à financer les frais de justice conformément à nos CGU [conditions générales d’utilisation] et à la législation en vigueur ».

Un montant « choquant »

La plateforme rappelle que ses CGU « proscrivent toute incitation à la haine ou à la violence ». Or l’ancien champion de boxe est soupçonné d’avoir porté des coups à deux gendarmes sur une passerelle à Paris, samedi, lors de l’« acte VIII » des « gilets jaunes ». L’un en face à face, debout, à l’aide de ses techniques de boxe, le second au sol, à coups de pieds. Dans une vidéo postée sur Internet avant de se rendre, il a admis avoir « mal réagi », mais dit s’être « défendu » face aux violences policières.

Dans la matinée, le nombre de donateurs continuait à grimper de façon exponentielle (environ 7 000 dons vers 8 h 30, près de 7 500 à 10 h 45), mais le montant récolté n’était plus visible. « Suite à l’engouement et aux pressions médiatiques, et afin de préserver la famille de Christophe, nous avons décidé de ne plus afficher le montant total », avait expliqué l’organisateur de la cagnotte sur la page de présentation de celle-ci.

Plusieurs ministres et membres du gouvernement s’étaient ému du succès de cette cagnotte, certains demandant sa suppression, comme la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes. « Soutenir cela, c’est être complice de cet acte et encourager [les violences] », avait argué Marlène Schiappa, invitée de Franceinfo. Interrogée sur la même chaîne, la ministre des transports, Elisabeth Borne, avait pour sa part déclaré que le succès de cette cagnotte était « choquant » :

« Est-ce que c’est normal de vouloir apporter un soutien à ce monsieur qu’on a vu frapper un policier à terre, qu’on a vu boxer un policier ? […] Je pense qu’il faut aussi que chacun reprenne un peu ses repères. »

Cette cagnotte « n’est en aucun cas une “récompense” »

« Apparemment, ça rapporte de frapper un policier », avait également protesté sur Twitter le secrétaire d’Etat chargé du numérique, Mounir Mahjoubi :

Le syndicat Alliance Police nationale avait lui aussi demandé le retrait de cette cagnotte lors d’une intervention à l’antenne de BFM-TV. De son côté, la Confédération française démocratique du travail (CFDT) des cadres de la sécurité intérieure avait dénoncé une « énième provocation » :

Interpellée sur Twitter, Leetchi avait répondu au cours de la matinée à des internautes qui critiquaient l’initiative, soulignant qu’en tant que « plate-forme », elle se devait de rester « neutre ».

« Nous n’avons pas à juger le contenu tant que celui-ci est conforme à la loi, ce qui est le cas ici », avait notamment répondu Leetchi. Cette cagnotte « n’est en aucun cas une “récompense” et nous allons nous assurer qu’elle ne serve qu’aux frais d’avocats, comme prévu par l’organisateur », avait également écrit sur Twitter l’hébergeur de la cagnotte.

Une cagnotte pour les forces de l’ordre blessées en réponse

En réaction à la cagnotte de soutien à l’ex-boxeur Christophe Dettinger, le président Les Républicains de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, a lancé mardi une cagnotte en ligne pour les forces de l’ordre blessées lors de manifestations de « gilets jaunes ». L’ex-secrétaire d’Etat aux affaires étrangères a lui aussi choisi la plate-forme Leetchi :

« En dehors du caractère absolument amoral de cette démarche qu’il convient de dénoncer, il est de notre devoir en tant qu’amoureux de la République de répondre à cette initiative […] Quand on s’attaque à un policier, à un gendarme ou à un sapeur-pompier, c’est en réalité à la France que l’on s’attaque. »

M. Muselier veut soutenir les 1 050 policiers, gendarmes et pompiers blessés depuis le début du mouvement des « gilets jaunes », « celles et ceux qui mettent leur vie en danger pour protéger la nôtre et faire respecter l’ordre républicain en France font face à un déferlement de violence et de haine absolument intolérable ». Peu avant 12 h 30 mardi, plus de 1 100 euros avaient été versés pour cette cagnotte.