L’usine Ford de Blanquefort (Gironde), près de Bordeaux, en février 2018. / NICOLAS TUCAT / AFP

C’est un jour sombre pour le secteur automobile européen. Cinq ans après d’importantes vagues de restructurations touchant essentiellement Renault, PSA, Fiat ou General Motors, Ford et Jaguar Land Rover ont annoncé de concert, jeudi 10 janvier, leur intention de supprimer des milliers de postes.

Dans le rouge en 2018 en Europe, après une année 2017 tout juste à l’équilibre, Ford a décidé de recourir aux grands moyens. Après la fermeture, confirmée pour août, de l’usine de transmission de Blanquefort (Gironde) et l’arrêt de la fabrication de certains modèles à l’usine allemande de Sarrelouis (Sarre), le groupe, qui détient 24 sites de production sur le Vieux Continent, pourrait encore réduire son implantation industrielle.

« Nous ne pouvons pas donner plus de détails tant que nous négocions avec les différentes organisations syndicales concernées par ces restructurations, a expliqué Steven Armstrong, le patron de Ford pour l’Europe, lors d’une conférence téléphonique. Cependant, nous pouvons indiquer qu’un nombre significatif d’emplois sera supprimé. » La firme à l’ovale bleu emploie 53 000 personnes.

Le constructeur de Dearborn (Michigan) n’entend cependant pas se retirer du marché européen. « Nous sommes la première marque sur le marché des véhi­cules utilitaires, commente M. Armstrong, et nous pouvons encore faire mieux dans ce domaine. De même, si nous allons revoir à la baisse notre offre de modèles de véhicule, nous entendons vendre davantage de véhicules haut de gamme. » Par ailleurs, l’américain va également lancer officiellement, mardi 15 janvier, une alliance avec le groupe Volkswagen qui pourrait l’aider à baisser ses coûts en Europe.

Ces mesures doivent permettre au constructeur de retrouver une marge de 6 % sur la zone, au lieu du 1 % difficilement atteint ces dernières années. Il y a cinq ans, tant Renault que PSA, au bord du gouffre, peinaient à atteindre la rentabilité. Au premier semestre 2018, les deux sociétés ont affiché des marges de plus de 6 %, après avoir procédé à de profondes restructurations.

« Mesures énergiques »

Si Ford paie ses difficultés en Europe, avec le ralentissement des immatriculations, notamment sur ses marchés principaux – le Royaume-Uni et l’Allemagne –, Jaguar Land Rover (JLR), de son côté, se restructure en partie pour faire face à ses difficultés en Chine.

Le premier constructeur automobile britannique a annoncé jeudi la suppression de 4 500 postes (soit un peu plus de 10 % de ses effectifs), essentiellement au Royaume-Uni, dans le cadre d’un plan d’économie de 2,5 milliards de livres (2,8 milliards d’euros). La filiale de Tata Motors souhaite faire partir principalement des cadres. Elle a perdu 354 millions de livres entre avril et septembre 2018, et a déjà supprimé un millier de postes en Grande-Bretagne.

« Nous prenons des mesures énergiques pour contribuer à parvenir à une croissance de long terme face aux multiples perturbations géopolitiques et réglementaires et aux défis technologiques auxquels est confronté le secteur automobile », a déclaré Ralf Speth, le patron allemand de JLR. Reste que ces annonces marquent un coup d’arrêt pour le groupe britannique, qui, ces dernières années, a ouvert de nouvelles usines en Chine et en Slovaquie.

Surtout, M. Speth estime qu’un mauvais accord sur le Brexit pourrait entraîner la destruction de dizaines de milliers d’emplois dans le secteur automobile britannique. Chez Ford, on se prépare à cette éventualité, mais cela n’a pas influencé le plan de réorganisation du constructeur, insiste M. Armstrong.