Le lancement imminent du grand débat national n’y change rien : les « gilets jaunes » préparent de nouveaux rassemblements le samedi 12 janvier à travers la France, pour le neuvième week-end consécutif depuis l’acte I du mouvement, le 17 novembre 2018.

Deux mois après, le mouvement reste protéiforme, et ses figures « historiques » n’ont pas la même stratégie pour cet acte IX. Certains semblent vouloir concentrer l’événement à Paris – théâtre de violences samedi dernier comme les week-ends précédents –, tandis que d’autres invitent à se rassembler dans un lieu inhabituel, à Bourges, dans le Cher.

  • Un rassemblement prévu à la Défense

Le chauffeur routier Eric Drouet, organisateur emblématique des manifestations, privilégie Paris. Le lieu de rassemblement, annoncé par un événement sur Facebook, « Paris nous revoilà ! » (avec plus de 3 000 participants et 16 000 personnes intéressés vendredi matin), a été fixé sur le parvis de la Défense.

Les autorités s’attendent à une mobilisation « plus forte » à Paris que la semaine précédente. « Nous pensons que la mobilisation sera plus forte que samedi dernier d’une part, et que le comportement au sein des groupes qui seront présents sera marqué par plus de radicalité, plus de tentations de violence », a déclaré sur CNews, vendredi, le préfet de police de Paris, Michel Delpuech.

  • Bourges, épicentre de la mobilisation ?

L’autoentrepreneuse Priscillia Ludosky et le Breton Maxime Nicolle, deux autres figures du mouvement, ont eux annoncé Bourges comme épicentre de la mobilisation. Au centre de la France, cette ville doit permettre « à tous d’être à distance égale en partance des grandes villes », peut-on lire sur Facebook. De plus, cette préfecture est « une ville un peu moins connue des forces de l’ordre pour éviter qu’il y ait du nassage [encerclement], de fait, que la tension monte », a expliqué Maxime Nicolle dans un entretien au site Konbini.

Vendredi matin, aucune demande d’autorisation de manifestation n’avait encore été déposée par les « gilets jaunes », selon la préfecture. Catherine Ferrier, la préfète du Cher, a annoncé, sur BFMTV, sa décision d’interdire par arrêté les manifestations dans le centre-ville de Bourges.

En revanche, Mme Ferrier laisse la possibilité « de permettre à la déambulation qui se veut pacifique, notamment avec la CGT, de circuler en dehors, sur les boulevards qui entourent la ville ». En effet, seule la CGT a déclaré une manifestation en préfecture. La préfète a précisé que des « “gilets jaunes” avec une intention très pacifique sont venus [lui] parler d’un itinéraire et d’un déroulé de la journée, mais ils n’ont pas encore déclaré formellement. Ils prennent leurs responsabilités ».

  • 80 000 policiers mobilisés

Après une baisse de la mobilisation pendant les fêtes, les « gilets jaunes » ont réussi leur pari pour leur acte VIII du 5 janvier : avec 50 000 manifestants dans toute la France, selon le gouvernement (dont 3 500 à Paris), la contestation a rebondi et montré sa résistance à l’usure. Surtout, les violences à Paris ont polarisé les esprits, notamment l’intrusion de manifestants dans le ministère du porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, et les images de l’ex-boxeur Christophe Dettinger en train de frapper des gendarmes.

Pour samedi, la préfecture de Paris a annoncé un dispositif de sécurité exceptionnel, qui va retrouver son niveau de la mi-décembre. Sur les 80 000 policiers et gendarmes mobilisés annoncés dans toute la France, « 5 000 » seront à Paris avec « 14 véhicules blindés sur roues de la gendarmerie ». Policiers et gendarmes ont pour consignes « de quadriller, être mobile, être réactif, interpeller très vite dès que des dérapages se produisent », a expliqué Michel Delpuech, mais aussi de procéder à des « contrôles en amont ».

  • Rassemblements prévus dans les grandes villes

D’autres rassemblements sont annoncés dans plusieurs villes : Bordeaux, Marseille, Toulouse, Lyon, Strasbourg, Lille, Nantes, Rennes… Des « gilets jaunes » prévoient aussi une reprise des blocages et certains appellent à retirer leur argent des banques, sans susciter l’inquiétude du secteur. Ils sont soutenus par Solidaires, seul syndicat à appeler à rejoindre les cortèges.

Dans ce contexte, le grand débat national, promis comme la voie de sortie de crise, semble patiner avant son coup d’envoi. Le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, doit se déplacer mardi dans l’Eure pour lancer la consultation. Entre thèmes ouverts et lignes rouges fixées à l’avance, l’opposition et certains « gilets jaunes » doutent déjà ouvertement de son utilité.