Marianna Fontana dans « Capri-Révolution », de Mario Martone. / PATHÉ

L’avis du « Monde » – on peut éviter

A la veille de la première guerre mondiale, l’île de Capri est une sorte de zone franche où confluent toutes sortes d’étrangers, des exilés russes fomentant la Révolution d’octobre aux communautés artistiques venues y créer en toute liberté. Lucia (Marianna Fontana), une bergère menant paître ses chèvres, tombe un beau jour sur de jeunes gens dansant nus sur un rocher, à la lumière du soleil couchant. Intriguée, elle se rapproche d’eux et de leur leader Seybu (Reinout Scholten van Aschat), un peintre avant-gardiste, et se libère peu à peu des traditions, apprend à lire et à écrire, découvre l’amour libre. Mais sa famille voit ses escapades d’un très mauvais œil et entend la marier au plus vite avec un commerçant de l’île.

Le nouveau film de Mario Martone (Leopardi : Il giovane favoloso, 2014) s’inspire de faits réels pour raconter la rencontre entre deux mondes, celui des villageois, vernaculaire et traditionnel, et celui des artistes, pionnier et hors-sol. Mais il s’inscrit tellement du côté des seconds, sortes de hippies cherchant un contact mystique avec la nature (mais ne faisant pourtant pas l’économie d’un leader charismatique), qu’il s’en remet à des oppositions simplistes et caricaturales.

Rapport de classe

Sa petite bohème naturiste et végétarienne apparaît nécessairement comme l’exception, éclairée et en avance sur son temps, quand les paysans pataugent dans leur ignorance et sont assimilés à une majorité oppressive, traditionaliste et d’arrière-garde. C’est aller un peu vite en besogne et oublier aussi le rapport de classe qui sépare les deux communautés (les artistes font partie d’une bourgeoisie intellectuelle).

Martone échoue également à définir la spécificité de cette expérience artistique et communautaire, qu’il filme surtout de l’extérieur comme un mauvais trip illuminé, entre atelier de peinture néomystique et relaxation de groupe. Sa mise en scène illustrative et lustrée, tressée de conventions narratives éculées (celles du drame historique d’antan), se montre tout simplement incapable d’appréhender la création ou l’avant-garde autrement que sous un filtre exotique du plus mauvais effet, c’est-à-dire comme des choses qui ne le concernent pas.

Capri-Revolution - Bande-annonce officielle HD
Durée : 01:35

Film italien et français de Mario Martone. Avec Marianna Fontana, Reinout Scholten van Aschat, Antonio Folletto, Jenna Thiam (2 h 02). Sur le Web : www.pathefilms.com/film/caprirevolution