Un détenu montre un serpent domestique dans la prison de San Juan de los Morros, au Venezuela, en 2013. / LEO RAMIREZ / AFP

« Tortues, serpents, oiseaux de proie, autruches, gazelles, hyènes… On voit passer toutes les espèces imaginables », s’étrangle Günther Wirth, de l’agence de coopération allemande GIZ. Ce dernier lutte depuis le Somaliland contre le commerce illégal d’espèces sauvages venant d’Afrique. « Les guépards sont les plus concernés par le trafic, poursuit-il, mais ils sont loin d’être la seule espèce sauvage à être braconnée pour servir d’animaux de compagnie dans le Golfe. »

A Dubaï ou à Riyad, nul ne songe à se contenter d’un chat ou d’un vulgaire cabot. On pourrait allonger sa liste sans difficulté, avec lions, léopards, chimpanzés, gibbons, mais aussi loups, jaguars d’Amazonie, orangs-outans de Sumatra, tigres du Bengale ou de Sibérie… Sur les réseaux sociaux, les vendeurs sont souvent les mêmes que pour les guépards, ce qui permet de douteux « achats groupés ».

Le nombre de ces animaux, parfois retenus dans de véritables petits zoos privés, est inconnu. Mais une certitude demeure : le Golfe est devenu l’une des grandes plaques tournantes du commerce illégal d’espèces sauvages (mortes ou vivantes), un trafic qui pèserait de 7 à 23 milliards de dollars au niveau mondial.

En août 2018, un rapport signé notamment par l’ONG Traffic et plusieurs institutions publiques, pointait le rôle des Emirats et de ses aéroports, dont Dubaï, où transitent 90 millions de passagers par an. La fédération serait devenue en une décennie le troisième « hub » du trafic, après la Chine et juste derrière la Thaïlande.

Sur la banquette d’une Lamborghini

La mode du félin de compagnie commence à se diffuser au-delà du Golfe. Les clichés du rappeur M. Pokora ou du footballeur Karim Benzema, posant tout sourire sur les réseaux sociaux avec des petits tigreaux lors de voyages à Dubaï, ont soulevé l’indignation des ONG. En France, de plus en plus de particuliers sont interpellés pour possession illégale de grands fauves. A l’automne 2018, plusieurs lionceaux ont ainsi été saisis en Ile-de-France et à Marseille, dont un retrouvé sur la banquette d’une Lamborghini aux Champs-Elysées.

Dans le Golfe, cette abondance de fauves, indomptables et négligemment surveillés, n’est pas sans poser problème. Il n’est pas rare de voir un prédateur de 200 ou 300 kilos errer sur les autoroutes ou sur les plages de Doha ou Dubaï. Les attaques sont récurrentes, parfois graves. En 2014, une femme de ménage philippine avait succombé à ses blessures au Koweït après avoir été quasiment dévorée par un lion de compagnie. Le félin s’était échappé de sa cage.