Son taux a beau être historiquement bas, le Livret A a une nouvelle fois attiré des milliards d’euros de dépôts en 2018, signe que ce placement bicentenaire conserve son attrait auprès des épargnants dans un contexte plus incertain que jamais.

Au total, la collecte nette, c’est-à-dire le montant des sommes déposées par les épargnants moins les retraits, a atteint 10,08 milliards d’euros l’an dernier, selon des chiffres dévoilés mardi 22 janvier par la Caisse des dépôts. C’est presque aussi bien qu’en 2017, année durant laquelle il avait signé sa meilleure performance depuis 2013 avec une collecte à 10,24 milliards d’euros.

283 milliards d’euros de dépôts

À fin décembre, ce sont ainsi plus de 283 milliards d’euros qui stationnaient sur le Livret A et près de 108 milliards sur son petit frère le Livret de développement durable et solidaire (LDDS), descendant du LDD élargi l’an dernier au financement de l’économie durable et solidaire.

Le taux de rémunération de ces placements réglementés n’a pourtant jamais été aussi bas : il est bloqué depuis presque trois ans à 0,75 % et – sauf surprise – ne devrait pas en bouger jusqu’en 2020 au moins.

Pour ne rien arranger, les prix à la consommation se sont renchéris de 1,8 % l’an dernier en moyenne. Or, lorsque l’épargne est placée sur un produit qui rapporte moins que le taux d’inflation, les ménages peuvent acheter moins de biens et services que précédemment avec leur bas de laine.

« Pour la première fois depuis 35 ans, le taux réel du Livret A est négatif, ce qui n’a pas empêché les épargnants de placer beaucoup d’épargne sur ce produit. On voit bien, donc, que ce n’est pas le rendement qui est recherché mais la sécurité », souligne Philippe Crevel, le directeur du Cercle de l’épargne.

De fait, l’année 2018 s’est déroulée dans un climat particulièrement difficile sur fond notamment de risques de guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, d’incertitudes autour du Brexit, de tensions politiques autour de l’Italie ou encore de prévisions de croissance revues à la baisse.

Gains garantis et disponibles

Créé il y a 200 ans, le Livret A, dont les gains sont garantis, disponibles à tout moment et entièrement défiscalisés, constitue souvent le premier accès des ménages à l’épargne et sert notamment à financer le logement social. Sa gestion financière est assurée par la Caisse des dépôts et les banques.

Au total, 55 millions de Livrets A sont détenus par des personnes physiques pour un montant moyen de 4 574 euros par livret, ce qui en fait un des placements favoris des Français, montre le dernier rapport de l’Observatoire de l’épargne réglementée.

Sa rémunération est définie par l’État, au moyen d’une formule savante mêlant rythme d’inflation et taux d’intérêt sur les marchés financiers. Cette question fait toutefois figure de casse-tête depuis plusieurs années pour les autorités, réduites à devoir jongler avec les intérêts, parfois contradictoires, des établissements financiers, des épargnants et du logement social, le tout dans un contexte de taux bas généralisés qui rend particulièrement ardue la tâche de faire fructifier l’argent.

Fin décembre, l’association de défense des consommateurs CLCV a appelé les autorités à modifier la méthode de calcul du taux du Livret A, pour que celui-ci soit au moins égal à la hausse des prix. Mais jusqu’à présent le gouvernement a opposé une fin de non-recevoir à ce type d’appel, jugeant la rémunération de ce placement très bonne dans l’environnement actuel.