Donald Trump à la Maison Blanche, le 23 janvier. / KEVIN LAMARQUE / REUTERS

La paralysie politique à Washington a contraint Donald Trump à reporter sine die le discours présidentiel sur l’état de l’Union, sans solution en vue pour sortir le pays du « shutdown » partiel (fermeture d’administrations fédérales) le plus long de l’histoire.

« Je ferai le discours quand le shutdown sera fini. Je ne recherche pas d’autre enceinte pour le discours sur l’état de l’Union parce qu’il n’y en a aucune qui puisse rivaliser avec l’histoire, la tradition et l’importance de la Chambre des représentants », a-t-il écrit sur Twitter, mercredi 23 janvier en fin de soirée.

D’après lui, ce « grand » discours – le deuxième depuis son arrivée à la Maison Blanche – sera prononcé « dans un futur proche ».

Cependant, le conflit entre républicains et démocrates qui prive de budget une partie des administrations fédérales semblait toujours insoluble. Le Sénat américain doit voter jeudi sur deux textes concurrents pour tenter, chacun à leur manière, de sortir de l’impasse, sans que ni Donald Trump ni l’opposition ne s’avouent prêts à céder.

Deux textes jeudi au Sénat

Au cœur de ce conflit qui dure depuis plus d’un mois : le mur que veut Donald Trump à la frontière avec le Mexique. Il réclame pour l’ériger plus de cinq milliards de dollars. Mais les démocrates, vent debout contre ce projet, refusent de signer un compromis budgétaire sur cette base. Faute d’accord, les budgets de certaines administrations sont bloqués depuis le 22 décembre. Quelque 800 000 employés fédéraux se retrouvent soit au chômage forcé, soit à travailler sans solde si leurs emplois sont jugés essentiels.

Jeudi, vers 14 h 30 (20 h 30 heure de Paris), les sénateurs voteront sur deux amendements concurrents. La proposition républicaine assure un financement du gouvernement jusqu’en septembre et intègre l’enveloppe pour le mur, ainsi qu’une concession accordée samedi par M. Trump : un sursis de trois ans pour un million d’immigrants directement menacés d’expulsion. Le texte démocrate ne contient pas de budget pour le mur. Il propose la réouverture des administrations jusqu’au 8 février et promet de relancer le débat sur la sécurité aux frontières une fois le shutdown levé.

Pour être approuvés, ces amendements doivent obtenir 60 voix au Sénat, où les républicains détiennent 53 des 100 sièges. En l’état, il semble probable qu’aucun des deux groupes ne parviendra à rallier suffisamment de voix dissidentes. Tout texte devrait ensuite franchir la Chambre des représentants, aux mains des démocrates.

Signe qu’aucune issue ne semble immédiate, les chefs démocrates de la chambre basse ont annoncé mercredi soir ne pas attendre de vote vendredi. Si un accord apparaissait au Sénat, les élus de la Chambre recevraient un préavis de vingt-quatre heures pour venir voter.

« Otage affamée »

Le discours sur l’état de l’Union, où les présidents américains exposent chaque année leur programme et leur vision de l’avenir du pays, était programmé cette année pour le 29 janvier. La présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, qui avait lancé à M. Trump l’invitation début janvier, lui a ensuite demandé de reporter son intervention, affirmant qu’il serait trop difficile d’assurer la sécurité à cause du shutdown.

« Comme le shutdown se poursuivait, Nancy Pelosi m’a demandé de prononcer le discours sur l’état de l’Union. J’ai dit d’accord. Elle a ensuite changé d’avis à cause du shutdown, suggérant une date ultérieure. C’est sa prérogative », a estimé le président sur Twitter.

« M. le président, j’espère qu’en disant futur proche, vous entendez là que vous soutiendrez le texte soutenu par la Chambre pour mettre fin au shutdown, sur lequel votera le Sénat demain [jeudi]. Veuillez accepter cette proposition afin que nous puissions rouvrir les administrations, payer de nouveau nos fonctionnaires fédéraux et, ensuite, aplanir nos divergences », a répliqué Mme Pelosi.

Les deux camps se rejettent la responsabilité du blocage budgétaire, qui affecte durement fonctionnaires et sous-traitants, dont les emplois dépendent directement du gouvernement. Ces derniers, nombreux, ne seront pas payés rétroactivement, à la différence des employés fédéraux. Mercredi, quelque 500 manifestants ont participé à un rassemblement dans un bâtiment annexe du Congrès. « Otage affamée », pouvait-on lire sur le bandeau d’une manifestante, tandis que de nombreux participants brandissaient des pancartes avec ces mots : « Laissez-moi travailler ! »