Sur les images de vidéosurveillance de la galerie Tretiakov de Moscou, on voit le voleur sortir tranquillement, le tableau à la main. / HANDOUT / AFP

L’homme regarde le tableau, les bras croisés. Il s’en approche, dépasse la ligne de sécurité, puis décroche soudainement le cadre du mur. Au vu de tous les autres visiteurs de la galerie Tretiakov de Moscou, le voleur repart avec la peinture. Comme si de rien n’était.

Les images de vidéosurveillance diffusées par les médias russes montrent un mode opératoire d’une rare simplicité. Dimanche 27 janvier, un homme au crâne rasé et vêtu de noir, visage découvert, a pu voler sans problème un tableau du peintre russe Arkhip Kouïndji, représentant le mont Aï-Petri, en Crimée.

Malgré l’arrestation par la police, quelques heures après le larcin, d’un homme de 31 ans et la restitution du tableau, les faits restent humiliants pour l’établissement, l’un des plus prestigieux musées russes. Les autorités russes, frappées par ce vol sidérant, ont d’ailleurs promis lundi de revoir la sécurité des principaux musées.

La galerie Tretiakov, située dans le centre de Moscou, n’a pas expliqué le manque de réactivité des membres du service de sécurité du musée lors de ce vol, qui a eu lieu vers 18 heures, heure locale, alors que la galerie était très fréquentée. Selon la direction du musée, l’alarme a été donnée par un surveillant, mais seulement après la sortie du voleur, qui est parti en voiture.

La toile, peinte entre 1898 et 1908, a finalement été retrouvée sur un chantier, où elle avait été cachée, selon un communiqué du ministère russe de l’intérieur. Prêtée par le célèbre Musée russe de Saint-Pétersbourg, elle a été estimée à environ 175 000 euros par un historien de l’art interrogé par l’agence publique TASS.

Des images diffusées par le ministère de la culture russe le 28 janvier montrent la peinture d’Arkhip Kouïndji, retrouvée après le vol. / HANDOUT / AFP

Selon les autorités, le voleur présumé avait déjà été inculpé par le passé de détention de stupéfiants et faisait l’objet d’une interdiction de quitter le territoire. La police tente de déterminer s’il a agi avec l’aide de complices.

Un « miracle »

La directrice de la galerie Tretiakov, Zelfira Tregoulova, a qualifié lors d’une conférence de presse de « miracle » le fait que la toile a été retrouvée rapidement et sans dommage. Des experts doivent désormais l’examiner plus en détail.

Elle a estimé que son institution, en plus de moderniser sa sécurité, devait changer sa « mentalité » pour mieux se préparer à ce genre d’incident, alors que les salles des grands musées russes sont souvent surveillées par des personnes âgées chargées surtout de la discipline des visiteurs.

Il faut dire qu’il s’agit du deuxième incident embarrassant en moins d’un an pour la galerie. A la fin mai, un homme de 37 ans avait vandalisé, en brisant la vitre de protection, l’une des plus célèbres toiles du musée, représentant Ivan le Terrible tuant son fils, peinte par Ilia Répine. Déchirée à trois endroits, la peinture avait dû être retirée de la salle où elle était exposée, pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale.

Ce nouvel incident a poussé le ministère de la culture russe à annoncer de futurs audits de la sécurité des principaux musées, ainsi que son intention d’équiper tous les tableaux de la galerie Tretiakov d’alarmes se déclenchant si un visiteur venait à s’approcher trop près. Le Kremlin a assuré lundi que la galerie était « protégée de manière adéquate », mais a reconnu que des « conclusions devaient être tirées » à la suite de ce vol en matière de sécurité.

Fondée en 1856, la galerie Tretiakov possède une des plus riches collections de Russie. Parmi ses pièces maîtresses sont exposés des œuvres de Marc Chagall, de Vassily Kandinsky ou le célèbre Carré noir sur fond blanc, de Kasimir Malevitch.