Des manifestants réclamant la démission de Nicolas Maduro et brandissant des pancartes où l’on peut lire : « non à la dictature », le 30 janvier à Caracas au Venezuela. / Ariana Cubillos / AP

L’opposition vénézuélienne, dirigée par le président autoproclamé Juan Guaido, défie samedi 2 février dans la rue le chef de l’Etat Nicolas Maduro pour exiger qu’il abandonne le pouvoir, à l’occasion du très symbolique 20e anniversaire de la révolution bolivarienne du défunt Hugo Chavez.

C’est dans un contexte particulièrement tendu que les deux camps doivent défiler à partir de 10 heures locales (15 heures en France) en deux lieux distincts de Caracas. Au Venezuela, pays pétrolier qui fut le plus riche d’Amérique latine, deux hommes se disputent le pouvoir : Nicolas Maduro, qui n’est pas reconnu par une partie de la communauté internationale, et l’opposant Juan Guaido, soutenu par les Etats-Unis, la plupart des Etats latino-américains et certains pays européens.

La manifestation de l’opposition devant la représentation de l’UE au Venezuela veut envoyer « un message à l’Union européenne » pour remercier « tous ces pays qui, très bientôt, vont nous reconnaître », a déclaré Juan Guaido, 35 ans, qui préside le Parlement, seule institution contrôlée par les adversaires de Nicolas Maduro. Ceux-ci jugent le second mandat de M. Maduro, entamé le 10 janvier, illégitime car issu d’élections frauduleuses.

Les 20 ans de la « révolution »

Le choix de défiler samedi n’est pas anodin : c’est le jour anniversaire des 20 ans de la « révolution bolivarienne », du nom du héros de l’indépendance Simon Bolivar. Cet anniversaire marque l’investiture, le 2 février 1999, du président socialiste Hugo Chavez (1999-2013), aujourd’hui décédé et dont se réclame Nicolas Maduro.

Alors que le Parlement européen a appelé jeudi, en reconnaissant l’autorité de M. Guaido, tous les pays de l’UE à faire de même, six d’entre eux (Espagne, France, Allemagne, Royaume-Uni, Portugal, Pays-Bas) ont donné au chef de l’Etat jusqu’à dimanche pour convoquer des élections, faute de quoi ils reconnaîtront Juan Guaido comme président.

Soutenu par la Russie, la Chine, la Corée du Nord, la Turquie ou encore Cuba, M. Maduro, 56 ans, rejette l’ultimatum européen et accuse les Etats-Unis d’orchestrer un coup d’Etat. « La rue et encore la rue pour défendre la patrie et la révolution », a lancé le dirigeant socialiste à ses partisans qui se réuniront sur la place Bolivar, au cœur de Caracas et à 10 km du rassemblement adverse.

La tension grimpe à chaque appel à manifester au Venezuela. Une quarantaine de personnes ont été tuées et plus de 850 arrêtées selon l’ONU depuis le début des mobilisations le 21 janvier. En 2014 et 2017, deux vagues de protestations avaient fait quelque 200 morts.

Exode et inflation

Le Venezuela, pays aux énormes ressources pétrolières, a sombré économiquement et ses habitants souffrent de graves pénuries de nourriture et de médicaments, ainsi que d’une inflation galopante (10 000 000 % en 2019 selon le FMI), ce qui a contribué à faire chuter la popularité du dirigeant socialiste. Depuis 2015, quelque 2,3 millions de Vénézuéliens ont quitté le pays.

En déplacement à Miami vendredi, le vice-président américain Mike Pence a maintenu la pression sur le gouvernement de Maduro : « Il est temps de mettre fin à la dictature de Maduro une bonne fois pour toutes. Les Etats-Unis continueront à exercer une pression diplomatique et économique pour aboutir à une transition pacifique vers la démocratie ».

Juan Guaido a prévenu vendredi qu’il n’était prêt à des négociations que si le départ de Nicolas Maduro était dans la balance. « Nous serons intéressés par une négociation » dans le seul but de définir « les termes de la fin de l’usurpation, ce qui permettra de transférer le pouvoir (…) et de lancer un processus de transition aboutissant à des élections libres », a écrit le leader de l’opposition vénézuélienne dans un courrier adressé aux présidents de gauche du Mexique, Andres Manuel Lopez Obrador, et d’Uruguay, Tabaré Vazquez.

Ces deux pays ont annoncé mercredi la tenue d’une conférence des pays neutres vis-à-vis de la crise au Venezuela, le 7 février à Montevideo.