Le journaliste Paul Balta, en 2005, à Paris. / BOYAN TOPALOFF / AFP

Spécialiste du monde arabe, ancien correspondant du Monde à Alger (1973-1978), le journaliste Paul Balta est mort à Paris, le 27 janvier, à l’âge de 89 ans. Fait rare dans un pays aujourd’hui largement fermé à la presse étrangère, les autorités algériennes lui ont chaleureusement rendu hommage. Dans un message de « sincères condoléances » et de « profonde compassion à sa famille et à ses proches », l’ambassadeur d’Algérie en France, Abdelkader Mesdoua, a salué un « ami de l’Algérie (…) connu pour son attachement à notre pays où il a passé une partie de sa vie ».

Né le 24 mars 1929 à Alexandrie (Egypte), Paul Balta expliquait avoir très tôt parcouru les routes méditerranéennes, inscrites dans l’histoire familiale, lui qui était né d’une mère égyptienne et d’un père français, comptait un arrière-grand-père libanais et un grand-père chypriote grec. Dans un entretien à la chaîne Oumma TV en 2012, le journaliste raconte avoir 6 ans lors d’un premier périple familial en Terre sainte qui le mena au Liban, en Syrie, en Jordanie et en Palestine.

Paul Balta : « J'ai le monde arabe dans le sang »
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En 1947, alors qu’il est venu étudier à Paris, au lycée Louis-le-Grand, il découvre la pauvreté de l’enseignement sur le monde arabe et l’islam. « J’ai remarqué que mes condisciples les plus brillants connaissaient l’histoire de Rome et de civilisations lointaines, mais qu’ils n’avaient aucune idée de celle du Maghreb qui était pourtant très proche. C’est là que je me suis promis de m’y consacrer à la fin de mes études. » Il y consacrera l’ensemble de sa carrière et de ses écrits : « J’ai décidé de devenir un passeur, d’expliquer au monde arabe ce qu’était l’Europe, et à l’Europe ce qu’était le monde arabe. »

Après des études de philosophie, il commence à travailler au CNRS, puis à l’agence Associated Press avant de rejoindre Paris-Presse-L’Intransigeant. Il entre au Monde en 1970 pour couvrir l’actualité du Proche-Orient et du Maghreb. Un poste qu’il occupera jusqu’en 1985.

« Tu as du sang arabe dans les veines »

En 1973, il est nommé correspondant pour le Maghreb – de la Libye à la Mauritanie –, et basé à Alger. Une étape qui restera certainement parmi les plus marquantes. Le pays est alors dirigé par le président Houari Boumediene (1932-1978) avec lequel il noue une relation de proximité. « A mon arrivée à Alger en 1973, le président Boumediene me dit : “Tu as du sang arabe dans les veines. Tu pourras ainsi faire connaître le Maghreb de l’intérieur.”, relate Paul Balta en 2008 dans un entretien au quotidien algérien Liberté, avant de rappeler ses longues conversations avec le chef de l’Etat, en français mais aussi en arabe : « J’ai été reçu par feu Boumediene, pour cinquante heures d’entretiens de 1973 à 1978. Certaines fois à raison de deux heures par jour. »

Au total, il publiera une vingtaine d’ouvrages sur le monde arabe, la Méditerranée et l’islam

Le journaliste devra quitter l’Algérie en 1978 pour Téhéran où il est envoyé par le quotidien du soir couvrir la révolution islamique. Il aura, au cours de sa carrière, couvert les conflits israélo-arabes (1967-1973), ceux du Kurdistan et du Sahara occidental ainsi que la guerre Iran-Irak (1980-1988).

En 1985, il quitte Le Monde. Ce départ en préretraite est toutefois de courte durée puisqu’il devient directeur du Centre d’études de l’Orient contemporain à l’université Paris III-Sorbonne Nouvelle (1988-1994). De 1985 à 1998, il anime également le Séminaire de politique étrangère consacré au monde arabe et à l’islam au Centre de formation et de perfectionnement des journalistes de Paris.

Il continue à écrire sur le monde arabe, la Méditerranée et l’islam. Au total, il publiera une vingtaine d’ouvrages, notamment La Politique arabe de la France (Sindbad, 1973), La Stratégie de Boumediene (Sindbad, 1978) ou L’Algérie des Algériens : vingt ans après (Editions ouvrières, 1981), avec son épouse, Claudine Rulleau.

Paul Balta en quelques dates

24 mars 1929 Naissance Alexandrie (Egypte)
1970-1985 journaliste au « Monde »
1973-1978 Correspondant à Alger
1988 Directeur du Centre d’études de l’Orient contemporain à l’Université Paris III-Sorbonne Nouvelle
27 janvier 2019 Mort à Paris