L’avis du « Monde » – pourquoi pas

Un aviateur nommé Overgard (Mads Mikkelsen), volant au-dessus de l’Arctique, s’écrase en pleine banquise. Perdu au cœur de vastes étendues enneigées, assailli par le froid polaire, il survit en s’abritant dans la carlingue de son appareil et use de tous les moyens à sa disposition pour envoyer des messages d’alerte. Quelques jours plus tard, un hélicoptère de secours le repère, mais s’écrase lui aussi dans une violente bourrasque. Des deux pilotes ne demeure qu’une survivante, une femme inconsciente et blessée à l’abdomen. Overgard lui prodigue les premiers soins et entreprend de rejoindre la base scientifique la plus proche, en tirant la blessée sur un traîneau.

Avec ce premier long-métrage, Joe Penna, jeune musicien et réalisateur de 31 ans, d’origine brésilienne mais installé à Los Angeles, opte pour un survival classique, qui consiste à plonger un personnage dans une nature hostile et observer ses efforts pour rester en vie. Arctic capte d’abord l’attention par son parti pris minimaliste, celui de s’attacher aux seuls faits et gestes d’Overgard, sur un mode strictement comportemental qui ne s’embarrasse ni de background psychologique ni de justification émotionnelle. Chevillé à l’ingéniosité et à l’opiniâtreté de son personnage, le film regorge de notations pragmatiques et de gestes astucieux, qui en constituent toute l’épaisseur : exploiter intelligemment de maigres ressources, conserver une notion du temps dans la blancheur immaculée, se protéger du froid ou s’abriter d’une tempête de neige.

Mise en scène sèche et pragmatique

Si tout survival peut se voir comme une étude sur la résistance d’un corps dans un milieu donné, Arctic complique la donne en confiant à l’imposante silhouette de Mads Mikkelsen, aux prises avec les éléments, un second corps inerte dont il doit assurer la conservation. En présence de ce personnage inconscient, le sujet se déplace : il ne s’agit plus seulement d’une lutte pour la survie, mais de l’aide inconditionnelle que tout homme doit à son semblable, sans quoi l’espoir et la force le quittent.

Sa mise en scène sèche et pragmatique, isolant l’homme dans des paysages dont la blanche abstraction le dépasse, est en même temps le point fort et la limite du film : très terre à terre, jouant avant tout sur les variations d’axe et d’échelle, elle manque néanmoins d’une forme d’élévation pour atteindre à une véritable expérience plastique. L’accumulation des péripéties fait basculer le film hors de son ornière réaliste, dans un registre mélodramatique qui arrive un peu tardivement pour susciter l’émotion. Arctic n’en remplit pas moins honnêtement son programme d’aventure physique, en nous faisant grâce d’un discours qui l’aurait sans doute alourdi.

Arctic - Bande-annonce française officielle
Durée : 02:01

Film islandais de Joe Penna. Avec Mads Mikkelsen, Maria Thelma Smaradottir, Tintrinai Thikhasuk (1 h 37). Sur le Web : www.thejokersfilms.com/films/arctic, www.les-bookmakers.com/films/arctic et bleeckerstreetmedia.com/arctic