Donald Trump devant le Congrès américain durant son discours sur l’état de l’Union, le 5 février à Washington. / ANDREW HARNIK / AP

Face au Congrès réuni au grand complet, le président américain Donald Trump s’est posé mardi 5 février en rassembleur pour son deuxième discours annuel sur l’état de l’Union, mais les tensions politiques à Washington, alimentées par son projet de mur controversé, ont rendu l’exercice périlleux.

Pour ce traditionnel discours en prime time sur l’état de l’Union, le président américain a lancé un appel au compromis. « Le programme que je vais présenter ce soir n’est ni républicain, ni démocrate. C’est celui du peuple américain », a-t-il déclaré, portant son emblématique cravate rouge, devant plus de 500 élus, dont de nombreuses femmes démocrates vêtues de blanc, en hommage au centenaire du mouvement des suffragettes.

« Ensemble, nous pouvons mettre fin à des décennies de blocage politique, guérir les blessures anciennes, construire de nouvelles coalitions, esquisser de nouvelles solutions », a-t-il ajouté, s’en tenant assez fidèlement au texte défilant sur les téléprompteurs.

Le vice-président Mike Pence applaudit debout alors que Nancy Pelosi reste assise pour consulter la copie du discours de Donald Trump devant le Congrès à WashIngton le 5 février. / JOSHUA ROBERTS / REUTERS

  • Appel à arrêter les « enquêtes partisanes ridicules »

A vingt et un mois de la prochaine élection présidentielle, où il entend briguer un second mandat, le républicain a dénoncé, avec une virulence rare dans cette enceinte, les investigations du procureur spécial Robert Mueller et aux enquêtes parlementaires sur les liens entre son équipe de campagne et la Russie : « Un miracle économique se produit actuellement aux Etats-Unis et les seules choses qui pourraient le stopper sont les guerres insensées, les politiques ou les enquêtes partisanes ridicules. »

Ses remarques interviennent alors que les démocrates, qui contrôlent désormais la Chambre des représentants, ont lancé une série d’enquêtes sur l’administration Trump et que le procureur spécial Robert Mueller est chargé d’enquêter sur l’ingérence de la Russie lors de la campagne présidentielle de 2016. Moscou nie toute implication.

  • La défense du mur avec le Mexique

S’il a une nouvelle fois affirmé que le mur à la frontière avec le Mexique serait « construit », et qualifié l’immigration de « crise nationale d’urgence », le président a renoncé à décréter l’état d’urgence nationale qui l’autoriserait à financer le mur sans l’accord du Congrès. A la place, il a exhorté démocrates comme républicains à trouver un compromis d’ici au 15 février.

« Par le passé, la plupart des gens dans cette pièce ont voté pour un mur, mais le mur adéquat n’a jamais été construit. Je le ferai construire », a-t-il annoncé.

Les murs « fonctionnent et sauvent des vies, alors travaillons ensemble, trouvons un compromis et un accord », a-t-il précisé, ajoutant qu’il avait fait parvenir au Congrès une proposition allant « dans le sens de tous », comprenant notamment une « nouvelle barrière physique » à la frontière sud.

  • La baisse du prix des médicaments et l’éradication du sida « d’ici dix ans »

Evoquant les questions de santé, il a à nouveau insisté sur la baisse du prix de médicaments et a fixé comme objectif aux élus du Congrès de dégager les moyens nécessaires contre le sida. « Mon budget demandera aux démocrates et aux républicains de dégager les moyens nécessaires pour éliminer l’épidémie de VIH aux Etats-Unis d’ici dix ans. Ensemble, nous vaincrons le sida en Amérique et au-delà », a-t-il déclaré.

Et il a également évoqué le sujet de l’avortement : « Pour défendre la dignité de chaque personne, je demande au Congrès d’adopter une loi interdisant l’avortement tardif des enfants pouvant ressentir une douleur dans le ventre de leur mère. » L’avortement est autorisé aux Etats-Unis jusqu’à la 22e semaine de grossesse.

  • La confirmation d’un sommet avec Kim Jong-un au Vietnam

Le chapitre consacré à la politique étrangère lui a valu des applaudissements inégaux dans son camp tant certaines de ses décisions suscitent un malaise. Le Sénat a approuvé lundi soir à une très large majorité un amendement critiquant sa décision de retirer les troupes américaines de Syrie et d’Afghanistan, pays à propos duquel il a évoqué des discussions « constructives » avec les talibans.

Le président américain a aussi profité de ce rendez-vous pour annoncer le lieu et la date de son prochain sommet avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un qui se déroulera les 27 et 28 février au Vietnam.

Une nouvelle fois, il a averti la Chine qu’elle ne pourrait plus « voler les emplois et la richesse des Américains » et exigé des « changements structurels » de Pékin pour mettre fin à ses pratiques commerciales « injustes ».

Il a aussi assuré les Vénézuéliens du soutien américain dans leur « quête de liberté ». Les Etats-Unis, ainsi qu’une quarantaine d’autres pays, ont reconnu l’opposant vénézuélien Juan Guaido comme président par intérim et seule autorité légitime à Caracas.

  • Un « Happy birthday » pour détendre l’atmosphère

Dans l’hémicycle, le contraste était saisissant entre les rangs républicains et démocrates, beaucoup plus marqués par la diversité dans ce Congrès américain qui affiche depuis janvier un nombre record de femmes et d’élus issus de minorités.

Les élues démocrates se félicitent du nombre record de femmes  au Congrès. / JONATHAN ERNST / REUTERS

La première dame Melania Trump a été reçue par près d’une minute d’applaudissements, mais certains démocrates se sont abstenus.

Fait remarquable : le discours a été interrompu par un « Happy Birthday » chanté en cœur lorsque le président a présenté Judah Samet, survivant de la tuerie de la synagogue de Pittsburgh fin octobre 2018. « Ils ne le feraient pas pour moi », a ajouté Donald Trump dans les rires.

Le 45e président des Etats-Unis a conclu son discours sur une tonalité rassembleuse : « Nous devons choisir si nous nous définissons par nos différences ou si avons l’audace de les transcender. »

Le prochain combat budgétaire, avec une échéance fixée au 15 février, pourrait rapidement marquer la reprise d’un affrontement politique sans merci jusqu’à l’élection présidentielle de novembre 2020.