« Ce n’est pas spectaculaire, mais c’est important. » A Nantes puis à Rennes, vendredi 8 février, Edouard Philippe n’a pas fait de jaloux, il a délivré le même message dans les deux villes. Au point de commettre un lapsus en donnant du « Mme la présidente de Bretagne » à Christelle Morançais… présidente des Pays de la Loire.

L’affaire du jour, « moins violente, moins dynamique, moins provocante que les images dont nous nous abreuvons parfois jusqu’à plus soif » sur les chaînes d’information en continu, déplore le premier ministre, c’est la signature du « contrat d’avenir Pays de la Loire » et du « pacte d’accessibilité pour la Bretagne ». Deux plans déclenchés suite à l’abandon du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, en janvier 2018. Du « concret », du « structurant », à « hauteur d’homme », comme il dit, avec moult projets de constructions de voies ferroviaires, de prolongements de routes, de réaménagement d’aéroports.

« Cousu main »

Dans cette dynamique, la Bretagne jouit d’une avancée particulière. Le chef du gouvernement est en effet venu signer, sous les yeux de son ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, ancien président de la région, un « contrat d’action publique pour la Bretagne ». Premier pas vers la « différenciation » prônée depuis des mois par Emmanuel Macron, qui souhaite inscrire ce principe dans la prochaine réforme institutionnelle. En clair, l’Etat entend proposer du « cousu main » aux collectivités en fonction de leurs besoins, et non imposer à tout le monde un nouvel acte de décentralisation. Les Bretons, par exemple, peuvent maintenant adapter à leur guise le zonage des niches fiscales Pinel dans le domaine du logement.

Journée paisible, en apparence, dans la vie du gouvernement. Les ministres François de Rugy (transition écologique et solidaire), Elisabeth Borne (transports), Jacqueline Gourault (cohésion des territoires), ont pu profiter du déplacement pour mettre en avant leurs dossiers respectifs. Xavier Chinaud, conseiller politique du locataire de Matignon, a multiplié les apartés avec les élus – les élections municipales ont lieu dans bientôt un an. M. Philippe n’a répondu brièvement qu’à une seule question de la presse, sur la signature du contrat d’avenir. Les noms de Marie-Elodie Poitout et d’Alexandre Benalla n’ont pas eu le temps d’être prononcés.

Rien, donc, sur l’ancienne chef de la sécurité de Matignon, qui a quitté son poste, jeudi, après des révélations de Libération sur le contrat signé par son compagnon pour la protection d’un oligarque russe réputé proche du crime organisé. Contrat négocié par M. Benalla, alors qu’il travaillait encore à l’Elysée. Rien, non plus, sur l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet de Paris à la suite d’un courrier du directeur de cabinet du premier ministre rapportant des questions de médias relatives aux conversations de M. Benalla sur ce contrat – des échanges enregistrés qui ont été publiés par Mediapart. Mme Poitout nie tout lien avec ces enregistrements, qui auraient eu lieu, selon Valeurs actuelles, à son domicile.

« C’est désormais l’ensemble du sommet de l’Etat qui est impliqué dans l’affaire Benalla », a estimé le secrétaire général délégué du parti Les Républicains (LR), Geoffroy Didier. « Le premier ministre reste épargné, ce n’est pas Matignon le problème », veut convaincre au contraire l’entourage de M. Philippe, qui reconnaît simplement : « C’est emmerdant. » Pour ne pas dire important.