Le journaliste saoudien Jamal Khashoggi parle lors d’une conférence de presse à Manama, Bahreïn, le 15 décembre 2014. / Hasan Jamali / AP

Donald Trump a ignoré vendredi 8 février l’appel du Congrès américain à se prononcer sur le rôle du prince héritier d’Arabie saoudite dans l’assassinat de Jamal Khashoggi, une « ligne rouge » pour le royaume soumis à la pression de nouvelles révélations.

Le président des Etats-Unis avait théoriquement jusqu’à ce vendredi pour dire si Mohammed Ben Salman est responsable du meurtre du journaliste saoudien, tué et démembré début octobre dans le consulat de son pays à Istanbul par un commando venu de Riyad. Il s’agit d’une échéance imposée par des sénateurs démocrates et républicains, qui ont activé le 10 octobre une loi donnant 120 jours au locataire de la Maison Blanche pour trancher.

Mais son administration, qui fait tout pour préserver une alliance jugée incontournable depuis que cette affaire a profondément terni l’image des dirigeants saoudiens, n’a pas l’intention de s’y plier.

« Le président se réserve le droit de refuser, lorsqu’il le juge approprié, d’agir en réponse aux demandes d’une commission parlementaire », a dit à l’Agence France-Presse un haut responsable américain, invoquant notamment la « séparation des pouvoirs ».

Une proposition de loi pour interdire certaines ventes d’armes

Comme le département d’Etat la veille, il a souligné que Washington avait déjà sanctionné mi-novembre 17 Saoudiens, et a promis que le gouvernement continuerait à « faire en sorte que ceux qui sont responsables du meurtre de Jamal Khashoggi rendent des comptes ».

L’échéance de vendredi n’était « pas une demande », « c’est une obligation légale », a protesté le sénateur démocrate Patrick Leahy, accusant la Maison Blanche d’« aider les responsables à échapper à la justice ».

Le Sénat américain, pourtant contrôlé par le camp républicain du président, a déjà unanimement adopté une résolution jugeant le prince « responsable » du meurtre. L’administration Trump affirme ne pas disposer de preuve irréfutable de l’implication directe du jeune et puissant dirigeant saoudien, bien que les sénateurs, après avoir été informés à huis clos à l’automne des conclusions de la CIA, aient assuré avoir été confortés dans leur mise en cause de celui que l’on surnomme « MBS ».

Sans attendre une réponse de la Maison Blanche, des sénateurs des deux bords politiques ont présenté une proposition de loi pour interdire notamment certaines ventes d’armes à l’Arabie saoudite, en raison du meurtre du journaliste mais aussi du rôle controversé de Riyad dans « le conflit dévastateur au Yémen ».