Leur Tournoi des six nations se joue déjà là. Si elles veulent réitérer le Grand Chelem de l’an passé, les Françaises devront aussi l’emporter chez les Anglaises, dimanche 10 février à Doncaster (à partir de 13 h 45). Après la facile victoire des Bleues sur les Galloises (52-3), ce deuxième match de l’année met aux prises les deux nations qui dominent la compétition féminine.

Chacune avec son style de jeu, selon Gaëlle Mignot, bien placée pour en parler. L’ancienne talonneuse et capitaine du XV de France a disputé la saison 2017-2018 pour le club anglais de Richmond, dans le Grand Londres, avant de revenir jouer aujourd’hui pour Montpellier.

Les Françaises lors de leur victoire sur les Galloises, le 2 février à Montpellier, en ouverture du Tournoi des six nations. / SYLVAIN THOMAS / AFP

S’il y avait une différence entre le jeu en Angleterre et celui en France ?

Gaëlle Mignot : En France, on a un jeu plus en mouvement, plus aérien, on essaie de mettre énormément de vitesse. Il y a plus de liberté. Les Anglaises ont un jeu plus physique, plus direct. Quand on joue contre elles, ça tape fort. On sort d’un match assez « mâchées ». Elles jouent peut-être aussi avec moins d’incertitudes, dans le respect de schémas prédéfinis, avec des temps de jeu bien établis.

Le niveau du championnat, en revanche, est plus homogène en Angleterre. D’un week-end sur l’autre, les matchs ont la même intensité. En France, il y a encore quelques écarts de niveau…

En 2017, la France perdait en demi-finale de la Coupe du monde contre l’Angleterre. Laquelle des deux nations a-t-elle aujourd’hui l’ascendant ?

Ces deux équipes se valent vraiment, dans des registres différents. Mais je donnerais un petit avantage à la France : avec du mouvement, une capacité à mettre énormément de rythme, son jeu peut tout dynamiter et réussir à déplacer une équipe assez physique. Ça s’est déjà vu contre les Néo-Zélandaises, aujourd’hui loin d’être imbattables.

Quelle surprise vous a réservée le championnat anglais ?

Au tout début, une chose m’a un peu perturbée : c’est la préparation des matchs. En France, on a quand même un protocole avant les matchs, on se réunit souvent le matin, on fait un petit réveil musculaire, on mange toutes ensemble. Les Anglaises, elles, se donnent rendez-vous à seulement une heure et demie du match ! Et jusqu’au coup d’envoi, on ne dirait pas qu’elles vont jouer : ça chante, ça danse, ça crie, ça bouge… Ensuite, une fois sur le terrain, ça bascule très vite : elles ont une capacité à se mettre tout de suite dans l’événement.

Dans quelles conditions jouiez-vous à Richmond ?

Comme en France, les clubs ne donnent pas de contrats professionnels. A côté du rugby, certaines de mes coéquipières travaillaient dans l’informatique, dans le secrétariat, une autre était fermière. Moi, quand je ne jouais pas, j’entraînais des jeunes en tant que salariée de la Lions Sport Academy. C’est un ancien joueur de Richmond qui dirige cette entreprise et qui m’a embauchée.

A trente ans passés, pourquoi avoir tenté cette expérience à l’étranger ?

J’ai déjà obtenu en France un diplôme d’Etat pour exercer le métier d’entraîneuse. Aujourd’hui, j’entraîne des jeunes avec les clubs de Montpellier, notamment tous les meilleurs talonneurs entre les moins de 14 ans et les moins de 22 ans. Mais je voulais aussi voir ce qui se faisait ailleurs, alors j’ai voulu me faire ma propre opinion de l’Angleterre. J’avais prévu que l’expérience ne durerait qu’un an pour que je revienne ensuite la partager.

Alors ?

L’Angleterre, j’en garde un superbe souvenir ! Malgré le climat, pas du tout le même qu’à Montpellier. Et malgré certains aspects de la vie londonienne, comme les transports : j’habitais à environ 12 km de mon stade, pas une distance énorme en soi, mais je mettais parfois une heure et demie en voiture le soir pour venir m’entraîner.

Que retenez-vous des entraînements là-bas ?

A Richmond, j’ai bien aimé l’idée que tout le monde forme one club [un seul club]. Nous, les joueuses, on s’est entraînées pas mal de fois avec les garçons du club. Sur certains créneaux, les femmes et les hommes se mélangeaient et faisaient en commun les ateliers de musculation ou de préparation physique, par exemple.

Au besoin, des hommes intervenaient aussi parfois dans nos séances en ligne. Ils se mettaient en opposition, mais sans entrer en contact. Eux jouent en deuxième division nationale. J’ai trouvé ça positif, ça obligeait notre équipe de joueuses à avoir des contraintes différentes.