Des patrons d’auto-écoles se mobilisent, lundi 11 février, dans plusieurs villes de France à l’appel de leurs trois principaux syndicats, contre l’« ubérisation » en marche de leur profession, alors qu’un rapport parlementaire pourrait menacer, selon eux, leur réseau au profit des plates-formes en ligne.

Ce rapport de la députée du Gard Françoise Dumas(LRM) a été remis au premier ministre vendredi. Il n’a, pour l’instant, pas été rendu public, mais les trois organisations de la profession – le Conseil national des professions de l’automobile (CNPA), l’Union nationale intersyndicale des enseignants de la conduite (Unidec), et l’Union nationale des indépendants de la conduite (Unic) – , qui s’étaient déjà alarmées en novembre des déclarations d’Emmanuel Macron annonçant une « baisse drastique » du coût du permis, font front uni.

Pour défendre leur « savoir-faire au service de la sécurité routière », elles mèneront une opération escargot sur le périphérique parisien lundi à partir de 6 h 30 avant un rassemblement place d’Italie, et dans plusieurs villes de France (Bordeaux, Marseille, Nice…). Les syndicats redoutent des réformes synonymes d’« ubérisation » de leur métier avec la fin de l’agrément départemental, au profit d’un agrément national qui abandonnerait l’obligation d’avoir un local, ouvrant ainsi la voie aux plates-formes de mise en relation entre élèves et moniteurs synonymes, selon eux, de dumping social, ainsi qu’une généralisation des inscriptions à l’examen par l’élève lui-même, en candidat libre.

Les auto-écoles sont depuis de longues années soumises au contrôle du préfet, qui encadre les activités, le niveau de compétences des auto-écoles et leur implantation sur le territoire. La suppression de cet échelon régional au profit d’un agrément national fait redouter aux professionnels une absence de contrôle des nouvelles structures et un permis low cost.

« Permis de tuer »

Le président Emmanuel Macron a également évoqué jeudi, lors de son échange avec mille jeunes, la possibilité de passer « l’intégralité » du permis dans le cadre du futur Service national universel.

« Nous ne sommes pas des auto-écoles de l’ancien monde, comme on nous présente parfois, mais des auto-écoles de proximité. Et l’exécutif voudrait désormais créer un système hors sol », s’indigne Patrice Bessone, président du CNPA-Education routière, syndicat majoritaire parmi les dix mille auto-écoles (quarante mille salariés) : « Cela va à l’inverse des déclarations du président à la suite de la colère des “gilets jaunes”, qui disait qu’il fallait remettre du territoire, que le territoire a un sens. »

Pour lui, « tuer la proximité, c’est tuer la qualité. Et quand la qualité de l’enseignement du permis de conduire est bradée, ça devient un permis de tuer. » « On ne veut pas que la formation au permis de conduire soit associée à des formations low cost. On n’est pas contre les nouveaux arrivants, mais tout le monde doit être soumis aux mêmes règles », abonde le président de l’Unidec, Patrick Mirouse.

Les syndicats contestent également leur coût prétendument plus cher que celui des systèmes en ligne, car « des élèves mal préparés vont rater l’examen, devront le repasser et paieront finalement plus cher qu’annoncé », souligne M. Bessone. Pour faire baisser le prix – 1 800 euros en moyenne selon l’UFC-Que Choisir en 2016 –, ils proposent d’autres pistes : une baisse de la TVA, le développement de cours collectifs et des simulateurs de conduite, une meilleure orientation vers les dispositifs d’aide (compte personnel de formation, permis à un euro…).