Ce sont des livres courts et accessibles. Tous reviennent sur ce qu’est le populisme et quelle réalité cette notion recouvre. Chacun à leur manière, ils donnent des clés de compréhension d’un phénomène qui dépasse largement les seules frontières françaises. Un travail de clarification nécessaire dans une période où le mot « populisme » est souvent utilisé en politique pour disqualifier un adversaire.

Le titre de l’essai Brève introduction au populisme (coédité par la Fondation Jean-Jaurès et L’Aube, 2018) aurait pu être décliné au pluriel puisque ses auteurs, Cas Mudde, professeur à l’université de Géorgie aux Etats-Unis, et Cristobal Rovira Kaltwasser, professeur à l’université Diego Portales au Chili, s’évertuent à disséquer les différentes formes de populismes, avec des éclairages étrangers, notamment sud-américains, européens et nord-américains. Les deux universitaires ont réussi un pari difficile : rendre leur livre accessible à tous. Il y a ainsi peu de concepts théoriques, mais plutôt des exemples pratiques, présentés de manière didactique.

Une « idéologie peu substantielle »

Cas Mudde et Cristobal Rovira Kaltwasser entreprennent ainsi de donner une définition la plus précise possible du populisme, et listent ses concepts fondamentaux que sont « le peuple », « l’élite » et la « volonté générale ». Selon les auteurs, le populisme est donc une « idéologie peu substantielle qui considère que la société se divise en deux camps homogènes et antagonistes, le “peuple pur” et “l’élite corrompue” et qui affirme que la politique devrait être l’expression générale de la volonté du peuple ». Une définition qui diffère donc de celle de la philosophe postmarxiste Chantal Mouffe.

Cette dernière estime, en effet, que « le populisme est une stratégie de construction de la frontière politique sur le mode “ceux d’en bas contre ceux d’en haut” ». Selon cette conception, le populisme n’est donc ni une idéologie ni un régime et n’a pas de contenu programmatique spécifique. Il est, enfin, compatible avec des institutions politiques multiples en fonction des contextes sociaux et des traditions nationales.

Chantal Mouffe est, avec feu son époux Ernesto Laclau, la référence intellectuelle des populistes de gauche. Leurs travaux communs, puis ceux de la Belge, ont influencé aussi bien les Espagnols de Podemos que La France insoumise. Deux livres récents, Pour un populisme de gauche (Albin Michel, 2018) et Construire un peuple (coécrit avec Iñigo Errejon, l’un des fondateurs de Podemos, les éditions du Cerf, 2017), reprennent les grandes lignes de cette pensée, là encore écrits de manière accessible et condensée.

Les plus curieux pourront se plonger dans Hégémonie et stratégie socialiste, coécrit avec Ernesto Laclau (publié en Angleterre en 1985, traduit en français et publié aux éditions Les Solitaires intempestifs, en 2009), qui vient d’être réédité chez Pluriel et qui constitue l’œuvre phare des deux intellectuels.