A l’école primaire Jean Perrin, le 8 février 2016. / BORIS HORVAT / AFP

Le tribunal administratif de Marseille a annulé, mardi 12 février, le plan géant de reconstruction et de rénovation de 34 écoles en partenariat public-privé (PPP), voulu par le maire Jean-Claude Gaudin (LR). Les juges ont estimé recevables les recours déposés par un collectif de citoyens marseillais et par les conseils national et régional de l’ordre des architectes. Leur décision suit l’analyse du rapporteur public, qui avait estimé lors de l’audience qu’il était « difficile de conclure que le recours au PPP présente un bilan plus favorable que le recours à une maîtrise d’ouvrage publique », procédure plus classique que la municipalité se refuse à utiliser.

Depuis son vote par le conseil municipal le 16 octobre 2017, la délibération validant le Plan écoles avenir, présentée comme un « plan Marshall » des écoles marseillaises par le maire Jean-Claude Gaudin, était fortement décriée. Alors que l’état de délabrement d’une partie des 444 écoles primaires de la ville est régulièrement dénoncé par les associations de parents, d’élèves et d’enseignants, ce projet ne prévoit que la destruction et la reconstruction de 28 écoles et la construction de six établissements nouveaux pour un coût dépassant le milliard d’euros.

« Développer un plan réaliste pour rénover les écoles marseillaises »

« Une aberration » selon le collectif Marseille contre les PPP, qui réunit syndicats d’enseignants et de fonctionnaires, citoyens et professionnels du BTP. Dans un contre-projet très détaillé, le collectif a estimé à 313 millions d’euros le surcoût du Plan écoles avenir de la municipalité, soit près de 30 % de l’investissement prévu. Il prône la mise en place de rénovations en maîtrise d’ouvrage public, procédure qu’il estime plus rapide et moins coûteuse pour les finances municipales. Le collectif a également lancé une pétition demandant l’annulation de la délibération, relayée par deux conseillers municipaux d’opposition, le communiste Jean-Marc Coppola et le socialiste Benoît Payan, qui a réuni 11 500 signatures sur Internet.

« C’est une victoire historique contre une municipalité qui avait décidé de vendre nos écoles à des grands groupes du bâtiment. Nous avions dénoncé ce plan comme inique, maintenant, nous savons qu’il est aussi illégal », a relevé, mardi, à la sortie du tribunal administratif, le président du groupe socialiste au conseil municipal Benoît Payan qui appelle « solennellement, la mairie de Marseille à ne pas faire appel ». « Il faut maintenant se mettre autour d’une table avec la municipalité et développer un plan réaliste pour rénover les écoles marseillaises qui en ont bien besoin » a estimé, de son côté, Pierre-Marie Ganozzi, secrétaire départemental de la FSU et membre du collectif Marseille contre le PPP. « La balle est désormais dans le camp de la mairie. Le plus raisonnable serait qu’elle accepte cette décision qui nous satisfait », a expliqué Alain Beitone, un des trois citoyens à avoir déposé un recours dans ce dossier.

Avant même la décision du tribunal administratif, la mairie de Marseille a fait savoir qu’elle n’abandonnerait pas son Plan écoles avenir. La décision du tribunal administratif est un camouflet pour Jean-Claude Gaudin et sa majorité, déjà mis à mal par la crise de l’habitat indigne dans leur ville.

Refaire en priorité les écoles en structure métallique

Malgré les recours déposés, la première tranche de la procédure a déjà été lancée. Cinq groupements planchent actuellement sur les projets de reconstruction de quatorze écoles. « Nous allons attendre d’étudier les conclusions des juges avant de nous prononcer sur un appel » notait, mardi matin, Yves Moraine, le président du groupe LR au conseil municipal de Marseille, joint par Le Monde après la lecture du jugement. « Mais le plus probable est que le maire fasse appel, car nous considérons que notre dossier tient la route », estime M. Moraine. La municipalité marseillaise met en avant son choix de refaire en priorité les écoles en structure métallique dites GEPP. « Ce n’est pas une tocade, ces écoles sont dangereuses et nous ne pouvons pas mener à bien ce projet en maîtrise d’ouvrage public », explique M. Moraine. L’annulation de la délibération bloque le projet et fragilise fortement sa réalisation, alors que la prochaine échéance municipale se profile en 2020. « On envisage de prendre les mesures juridiques qui laisseront à la future municipalité le choix de faire ou ne pas faire », assure à ce sujet M. Moraine.

« Un appel ne ferait que faire traîner l’affaire alors qu’un quart des écoles à Marseille est en mauvais état », regrette d’avance le secrétaire départemental de la FSU, Pierre-Marie Ganozzi qui a également annoncé que le collectif contre les PPP allait se transformer en collectif pour la rénovation des écoles. « Car nous savons tous que le besoin de travaux est urgent et nous voulons être une force de proposition », a-t-il conclu.