Quelques centaines de lycéens et étudiants ont organisé un sit-in devant les portes du ministère de la transition écologique, à Paris, vendredi 15 février. / JACQUES DEMARTHON / AFP

Ils espèrent que cette journée marquera le début d’un « printemps climatique ». Environ cinq cents étudiants et lycéens ont participé, vendredi 15 février, sous le soleil parisien, à un rassemblement devant le ministère de la transition écologique et solidaire, appelant le gouvernement à prendre des mesures d’urgence contre le changement climatique. Cette mobilisation, la première d’une série qu’ils espèrent hebdomadaire, marquait le ralliement des jeunes Français au mouvement Fridays for Future, qui voit se multiplier les grèves scolaires pour le climat dans plusieurs pays (Suède, Belgique, Australie, Allemagne, Suisse…).

Pour cette première « leçon au gouvernement », ces manifestants portent une revendication très ambitieuse, mais difficile à honorer pour l’exécutif : des mesures immédiates pour réduire de 4 % les émissions de gaz à effet de serre en France. Faute de quoi le gouvernement sera « sanctionné » et de nouvelles actions seront organisées le 22 février.

Un peu plus tôt dans la matinée, le ministre de la transition écologique, François de Rugy, avait salué le mouvement, assurant au micro de Franceinfo : « Nous pouvons marcher main dans la main pour le climat. » Sa secrétaire d’Etat, Brune Poirson, a même été dépêchée pour tenter de discuter avec les étudiants. En vain. S’emparant d’un mégaphone, la secrétaire d’Etat tente de rassurer : « Vous avez derrière ces portes des alliés », mais se fait huer quand elle dit : « Merci, je suis heureuse de vous voir ici. » Elle propose de recevoir une délégation de jeunes, mais se voit opposer une fin de non-recevoir. Les manifestants ne veulent pas désigner de représentants et invitent Brune Poirson à rester avec eux devant la porte du ministère. « J’ai tout mon temps cet après-midi, mais il faut qu’on organise la discussion. Je vous laisse voir entre vous », dit-elle avant de rentrer dans son cabinet.

La secrétaire d’Etat Brune Poirson interpellée par les étudiants et lycéens mobilisés pour l’urgence climatique, à Paris, le 15 février. / CHARLES PLATIAU / REUTERS

« On n’est pas dans une négociation »

Parmi les jeunes rassemblés, certains se disent prêts à accepter la proposition de la ministre – « Si on refuse le dialogue maintenant, on ne sera plus pris au sérieux » – mais sont vite rabroués : « On ne va pas envoyer une délégation. Tout est dans notre manifeste. Elle n’a qu’à le lire, c’est oui ou c’est non. » Le sit-in tourne à l’assemblée générale, le mégaphone passe de main en main. « On n’est pas dans une négociation avec le ministère. Nos propositions sont concrètes et techniques. Il suffit d’agir. » Un membre du ministère vient proposer que cent étudiants soient reçus, « la capacité maximum de notre salle », assure-t-elle. Mais les jeunes lui répondent en chœur : « C’est dans la rue, c’est pas dans les salons qu’on obtiendra satisfaction. »

« La politique actuelle ne s’intéresse pas à nous, déplore Cécile, 17 ans, élève au lycée Léonard-de-Vinci de Levallois (Hauts-de-Seine). Mais à l’inverse, la politique telle qu’elle est faite ne nous intéresse pas. » La lycéenne a rejoint des amis parisiens, Lili et Maxime, élèves au lycée Jules-Ferry (9e arrondissement). S’ils n’ont pas réussi à convaincre beaucoup d’autres camarades de les accompagner, ils ont reçu le soutien de parents ou de professeurs. « Dans mon lycée, beaucoup jettent des mégots par terre, regrette Lili, 18 ans. Ils n’ont pas conscience de l’impact de la pollution. »

« Fin du monde, fin du mois, mêmes victimes, mêmes combats »

Quelques étudiants portent des gilets jaunes, ou en ont noué à leur sac à dos. « Fin du monde, fin du mois, mêmes victimes, mêmes combats », entonnent-ils en écho au mouvement social qui a débuté au mois de novembre. Pierre-Louis, Jules et Maëlys, étudiants en médecine à l’université Paris-VI, se réjouissent que l’écologie soit aujourd’hui au cœur d’une autre mobilisation. « On a participé plusieurs samedis de suite à des manifestations des “gilets jaunes” parce qu’on veut porter l’exigence d’égalité sociale. Mais je ne me retrouve pas dans toutes les revendications des “gilets jaunes” », explique Louis. « Je me reconnais davantage dans cette mobilisation étudiante », renchérit Maëlys.

Après deux heures d’un rassemblement bon enfant, les CRS laissent sortir les étudiants au compte-gouttes, pour éviter qu’une manifestation sauvage ne s’ensuive. Malgré un démarrage timide, si on le compare aux milliers de manifestants hebdomadaires au Royaume-Uni ou en Belgique par exemple, beaucoup ressortent encouragés par cette première journée d’action : « C’est pas grave si on n’est pas très nombreux aujourd’hui. La mobilisation va faire mouche, et la semaine prochaine, on reviendra plus forts. »