Quelques poignées de djihadistes continuaient, dimanche 17 février, de défendre obstinément Baghouz, dernier village du « califat » du groupe Etat islamique (EI). / Felipe Dana / AP

Quel sera le sort des centaines d’anciens djihadistes européens partis combattre en Syrie au cours des dernières années ? Alors que l’Etat islamique (EI) perd de plus en plus de terrain, le président américain, Donald Trump, a exhorté, dimanche 17 février, les Européens à rapatrier leurs ressortissants, retenus en Syrie après avoir rallié le groupe islamiste. « Il n’y a pas d’alternative, car nous serions forcés de les libérer », a mis en garde le président américain, s’adressant particulièrement à la Grande-Bretagne, la France, et l’Allemagne. Une demande qui a provoqué des réactions très variées parmi les gouvernements européens, lundi 18 février :

  • La France « garde la politique qu’elle avait »

La politique de rapatriement des ressortissants français partis rejoindre l’EI en Syrie continue pour l’instant à se faire au « cas par cas », a réagi la ministre de la justice, Nicole Belloubet. « Il y a une situation géopolitique nouvelle qui vient d’être établie avec le retrait des Américains. Pour le moment, nous ne changeons pas de politique », a déclaré la ministre de la justice sur France 2.

« Nous nous sommes préparés au cas où quelque chose interviendrait de nouveau. Et, à ce stade, la France ne répond pas aux injonctions et garde la politique qu’elle avait, c’est-à-dire un accueil au cas par cas. »

On estime, de sources françaises, à environ 150 le nombre de ressortissants français, dont une cinquantaine d’adultes, détenus ou retenus dans le nord-est de la Syrie par les Forces démocratiques syriennes, alliées de la coalition internationale contre l’EI. Initialement très réticent à voir rentrer ces anciens djihadistes sur le territoire français, Paris a légèrement infléchi son discours au fil des semaines et ouvre progressivement la voie à un retour au compte-gouttes de ses ressortissants.

  • Le Royaume-Uni rejette l’appel de Trump

De son côté, Londres refuse toute pression de Washington. Le pays estime que les combattants étrangers de l’organisation djihadiste devraient être jugés là où les crimes ont été commis. « Les combattants étrangers devraient être traduits en justice conformément à la procédure légale adéquate dans la juridiction la plus appropriée », a déclaré un porte-parole de la première ministre, Theresa May. « Quand c’est possible, cela devrait avoir lieu dans la région où les crimes ont été commis », a-t-il ajouté.

  • Berlin reconnaît un « droit fondamental » de retour

Les Allemands qui ont combattu dans les rangs de l’Etat islamique en Syrie ont le droit de rentrer dans leur pays, a déclaré lundi un porte-parole du ministère de l’intérieur à Berlin. « Tous les citoyens allemands, y compris ceux qui sont soupçonnés d’avoir été membres de l’Etat islamique, ont le droit fondamental » de revenir en Allemagne, a expliqué le responsable.

Dimanche, le ministre des affaires étrangères allemand, Heiko Maas, avait cependant jugé « extrêmement difficile » d’organiser à ce stade un rapatriement. Un retour ne sera possible que si « nous pouvons garantir que ces personnes seront immédiatement traduites ici devant un tribunal et qu’elles seront mises en détention », a-t-il déclaré dimanche soir sur la chaîne ARD. « Nous avons besoin d’informations judiciaires, et cela n’est pas encore le cas ».

  • Une réunion européenne sur le sujet lundi

Dès dimanche, le ministre de la justice belge, Koen Geens, avait réclamé une « solution européenne », appelant à « réfléchir tranquillement et regarder ce qui comporte le moins de risques sécuritaires ». Le sujet doit être évoqué lundi lors d’une réunion des ministres des affaires étrangères des pays de l’Union européenne, à Bruxelles. Celle-ci portera, notamment, sur « la situation en Syrie, en particulier les derniers développements intervenus sur le terrain », selon l’ordre du jour de la réunion.