La proposition a été balayée aussi vite qu’elle est apparue. Il ne sera pas question de « sanctionner » pénalement l’antisionisme comme le proposait, lundi 18 février, le député La République en marche (LRM) Sylvain Maillard. Gilles Le Gendre, chef de file de la majorité, s’en est désolidarisé en réunion de groupe, mardi, évoquant une proposition « personnelle » de l’élu. Emmanuel Macron lui-même a déclaré dans la matinée qu’il ne pensait pas que « pénaliser l’antisionisme soit une solution ». « L’antisionisme (…) c’est autre chose [que l’antisémitisme] puisqu’il s’agit d’un positionnement politique consistant à critiquer la politique d’Israël », a rappelé Laurent Nuñez, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’intérieur lors des questions au gouvernement.

« Je ne suis pas naïf : il ne m’a pas échappé que derrière le faux nez de l’antisionisme pouvait se cacher de l’antisémitisme », a-t-il toutefois ajouté, avant de rassurer les parlementaires : « Chaque fois qu’au regard des caractéristiques de l’auteur et du contexte dans lequel des propos antisionistes ont été tenus, leur caractère antisémite peut être retenu (…). Mais nous le faisons à droit constant, les textes en vigueur, consacrés par la jurisprudence, nous le permettent déjà. »

Les députés du groupe d’étude antisémitisme présidé par M. Maillard ont donc retenu une autre option, plus symbolique, mardi 19, lors d’une réunion qui s’est tenue dans l’après-midi. Ils soumettront à l’Assemblée nationale l’adoption d’une résolution, à la portée non contraignante, qui proposera une autre nouvelle définition de l’antisémitisme. « Il s’agit de faire avancer la reconnaissance de ce qu’est l’antisémitisme au XXIe siècle », explique M. Maillard.

Eviter la propagation sur les réseaux sociaux

Dans cette définition, inspirée par celle retenue depuis 2017 par le Parlement européen, une forme d’antisionisme est reconnue. « Il y a plusieurs causes à l’antisémitisme et il y a une forme de haine des juifs liée au fait que l’on déteste Israël », estime la députée LRM Elise Fajgeles, présidente du groupe d’amitié France-Israël, favorable à cette proposition de résolution. Les membres du groupe d’étude espèrent ainsi envoyer un « message politique » a souligné M. Maillard à la sortie de la réunion. « C’est une invitation à l’exécutif de se saisir du sujet », a-t-il ajouté.

Parmi les députés, la multiplication des actes à caractères antisémites ces dernières semaines a provoqué plusieurs critiques contre le gouvernement. « Que les actes antisémites fassent l’objet de poursuites systématiques – c’est seulement le cas de la moitié d’entre eux – et de condamnations exemplaires », a exhorté Valérie Rabault, présidente du groupe socialiste à l’Assemblée mardi après-midi. Quelques heures auparavant, en conférence de presse, le président du groupe UDI, Agir et indépendants, Jean-Christophe Lagarde, plaidait pour un alourdissement des peines afin qu’elles soient « clairement dissuasives ». Les députés Les Républicains en appelaient eux aux « actes ».

Mardi, le patron des députés de droite, Christian Jacob, s’inquiétait du fait que l’un des hommes qui a proféré des injures antisémites à l’égard de l’académicien Alain Finkielkraut, « n’ait pas encore été arrêté » – cet homme a ensuite été placé en garde à vue dans la soirée. Au sein du groupe LRM, outre les propositions de la députée Laetitia Avia pour éviter la propagation des messages haineux sur les réseaux sociaux, le député Jean-François Mbaye a proposé au premier ministre que la loi de 1972 relative à la lutte contre le racisme et qui aborde l’antisémitisme soit évaluée pour l’adapter aux faits d’aujourd’hui.