Les Bleues ont chuté 1 à 0 face à l’Allemagne, jeudi 28 février à Laval. / FRANCK FIFE / AFP

« On apprend peu dans la victoire, mais beaucoup par la défaite ». C’est en tout cas le message proverbial qu’ont essayé de faire passer les Bleues après leur revers de fortune, jeudi 28 février à Laval, face à l’équipe d’Allemagne (1-0). Après huit succès de rang, les footballeuses françaises ont à nouveau connu le goût de la défaite. La dernière datait du 1er mars 2018, face à un autre grand rival européen, l’Angleterre (4-1).

Pour la sélectionneuse Corinne Diacre, c’était le moment où jamais pour perdre, à 99 jours du lancement de la Coupe du monde en France. « Il nous a manqué trop de choses pour être au niveau international. Beaucoup trop de joueuses ont été en dessous de leur niveau même si certaines ont tiré leur épingle du jeu. Ça nous fait redescendre sur terre, a analysé sans détours la sélectionneuse, On est passé à côté et c’est le bon moment pour. Et comme ça, on ne pourra plus nous taxer d’être championnes du monde des matchs amicaux. »

France-Allemagne, ce grand classique du football entre les joueuses de la sélectionneuse Corinne Diacre et celles de Martina-Voss-Tecklenburg, respectivement au 3e et au 2e rang du classement FIFA, avait tout du test d’envergure. L’équipe d’Allemagne étrennait sa nouvelle sélectionneuse tandis que l’équipe de France, en présence de la secrétaire générale de la Fédération française de football, Laura Georges, et de la vice-présidente, Brigitte Henriques, espérait poursuivre son excellente préparation.

Trop d’erreurs

Devant les 10 238 spectateurs du Stade Francis-Le-Basser [l’affluence moyenne du Stade Lavallois qui évolue en troisième division (National) n’est que de 3 872 supporteurs], il n’en fut rien. Les coéquipières de la capitaine Amandine Henry ont manqué un peu de tout : justesse technique et engagement dans les duels. Dur dès lors d’inquiéter une équipe d’Allemagne qui malgré une période moins flamboyante reste l’une des valeurs sûres du football au féminin. « Il faut être présentes dès la première minute. Nous étions trop basses sur le terrain, trop loin du but et il fallait faire de longues courses », a expliqué Amandine Henry. « C’est une défaite qui peut servir. Il faut mieux chuter maintenant que pendant la Coupe du monde », a ajouté la gardienne Sarah Bouhaddi.

La buteuse allemande s’appelle Lea Schuller. / David Vincent / AP

Molles et auteures d’une entame de match poussive, les Bleues sont complètement passées à côté de leur première période. Dès la 3e minute, Sarah Bouhaddi tergiversait, se faisait contrer par une attaquante allemande avant de se dégager au prix d’un dribble miraculeux. Sur son côté droit, étincelante contre les Etats-Unis en janvier dernier, l’ailière Delphine Cascarino prenait régulièrement le dessus sur sa défenseuse, Sara Dabritz, mais manquait de justesse sur ses centres.

Finalement, c’est une nouvelle erreur technique, une perte de balle dangereuse de Sakina Karchaoui, qui permettait aux Allemandes d’ouvrir le score grâce à Lea Schuller (1-0, 31e). Il fallait attendre la fin de la mi-temps pour assister à la première et quasi seule vraie occasion française : la remise lumineuse en talonnade de Marie-Antoinette Katoto offrait une position idéale à Gaëtane Thiney qui tirait à côté (44e).

« Je ne suis pas inquiète »

Réputée exigeante, Corinne Diacre, qui a connu jeudi soir sa troisième défaite à la tête des Bleues, va certainement remettre au travail son groupe et peaufiner les derniers détails à un peu plus de trois mois du match d’ouverture face à la Corée du Sud (7 juin au Parc des Princes). « On n’a pas vu un collectif ce soir. On ne pouvait pas y arriver. Nous avions toujours un temps de retard dans les duels, a-t-elle lancé, Nous n’avons pas été battues par beaucoup plus fortes que nous. Nous n’avons pas été décontenancées par les Allemandes. Je ne suis pas inquiète. Si l’on avait perdu en étant à notre niveau, j’aurais peut-être eu quelques inquiétudes… »

Les Bleues jouaient pour la deuxième fois de leur histoire à Laval, préfecture de la Mayenne aux 50 000 habitants. Elles avaient battu 2-1 la Nouvelle-Zélande en 2014. Enceinte à taille humaine (18 000 places) et au charme suranné, qui ne comprend que deux tribunes en dur, le stade Francis-Le-Basser respire le foot des années 70 et 80. L’équipe locale, le Stade Lavallois y a même terminé 5e de Division 1 en 1982 et en 1983.

L’Uruguay pour « rebondir » lundi

Jeudi soir, 27 ans après son départ, on n’aurait presque pas été surpris de voir apparaître la vieille casquette, entouré par ses deux célèbres touffes grisonnantes de l’ancien entraîneur mythique des Tangos, Michel Le Milinaire. Cet ex-instituteur, resté en poste 24 ans entre 1968 et 1992, dénonçait déjà en son temps les dérives du foot business.

Nul doute que l’ambiance populaire du soir, à l’image de cette haie d’honneur de jeunes footballeuses qui a chaleureusement salué l’arrivée des deux équipes, et l’atmosphère générale du foot au féminin, doivent plaire à ce grand pédagogue aujourd’hui âgé de 87 ans.

Les footballeuses françaises n’auront en tout cas pas le temps de ressasser cette contre-performance trop longtemps. Lundi, elles seront à Tours pour affronter l’Uruguay, une équipe non qualifiée pour le Mondial et qu’elles ont battue 8 à 0 lors de leur dernière confrontation. « Il va falloir rebondir lors du prochain match. Dans les vestiaires, nous n’étions pas assommées, au contraire. Ça nous motive encore plus », a lâché Amandine Henry.

Après l’Uruguay, elles disputeront encore quatre matchs de préparation, dont deux rencontres face au Japon (4 avril) et au Danemark (8 avril). Des tests intéressants pour montrer que la leçon allemande a bien été retenue.