Le patron de Facebook a qualifié le nouveau règlement européen sur les données personnelles de « très positif ». En coulisse pourtant, le lobbying de Facebook a œuvré contre le RGPD. / Karly Domb Sadof / AP

De nouveaux documents, dont le contenu a été révélé dimanche 3 mars par le Guardian et Computer Weekly, détaillent les pratiques de Facebook en matière de lobbying. Vraisemblablement issus des documents juridiques liés à un procès intenté à Facebook en Californie par une start-up, Six4Three, les documents comprennent plusieurs mémorandums internes de Facebook et éclairent les rapports du réseau social avec plusieurs chefs de gouvernement et avec l’Union européenne.

Les documents montrent notamment que Facebook a consacré beaucoup d’énergie à combattre le règlement général sur la protection des données (RGPD), mis en place en 2018. Si Mark Zuckerberg, le patron du réseau social, a qualifié à plusieurs reprises ce nouveau texte de « très positif », Facebook s’est beaucoup activé en coulisse pour tenter de limiter la portée de ce règlement européen sur la vie privée.

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L’un des mémos montre notamment que Facebook a tenté de tirer parti de la publication du livre de sa numéro 2 Sheryl Sandberg, En avant toutes, consacré à la place des femmes dans l’entreprise et les lieux de pouvoir, pour approcher la commissaire européenne à la justice Viviane Reding, perçue comme particulièrement hostile aux entreprises américaines. La manœuvre a échoué, note l’auteur du mémo, Mme Redding s’étant montrée peu convaincue par les arguments de Sheryl Sandberg.

Un « ami » premier ministre d’Irlande

Les documents révèlent également que Facebook a, dans plusieurs pays, fait miroiter de possibles investissements pour tenter d’influer sur des choix politiques. Au Canada, « Sheryl [Sandberg] a eu une approche ferme, et souligné qu’une décision sur l’implantation [d’un nouveau] data center était imminente. Elle a répété que si nous n’étions pas à l’aise sur la question législative avec le gouvernement canadien, nous avions d’autres options ».

Ces pratiques de lobbying relativement classiques se doublent de questions plus gênantes. Les documents décrivent également l’ex-premier ministre irlandais Enda Kenny, ancien chef du parti Fine Gael, comme un « ami de Facebook ». Le réseau social a son siège européen à Dublin, et le gendarme de la vie privée irlandais dispose théoriquement d’un important pouvoir sur l’entreprise. Les documents expliquent notamment que M. Kenny aurait offert d’user de « l’influence significative » qu’offrirait à l’Irlande la présidence tournante de l’Union européenne pour influer sur le RGPD, qu’il percevait comme une « menace pour l’emploi, l’innovation et la croissance économique en Europe ».