Le président de Huawei, Guo Ping, lors de la conférence de presse organisée à Shenzhen en Chine le 7 mars. / WANG ZHAO / AFP

Soupçonné d’espionnage potentiel par les Américains, le groupe chinois Huawei a contre-attaqué jeudi 7 mars en annonçant une plainte contre les Etats-Unis pour avoir interdit l’achat de ses équipements télécoms par l’administration. Le géant mondial des smartphones mène ainsi la bataille devant les tribunaux. Il avait déjà lancé une campagne médiatique destinée à contrer les accusations de Washington, selon qui les équipements de l’entreprise pour les futurs réseaux 5G pourraient être infiltrés par Pékin.

Huawei a indiqué que la plainte a été déposée à Plano, dans l’Etat du Texas (sud). Elle vise l’interdiction faite aux administrations américaines d’acheter les équipements et services du groupe chinois, ou de travailler avec des entreprises tierces qui sont ses clientes.

« Le Congrès américain n’a jamais pu fournir la moindre preuve pour justifier ses restrictions visant les produits Huawei. Nous sommes contraints de prendre cette action en justice en dernier recours », a indiqué dans un communiqué Guo Ping, l’un des présidents tournants de l’entreprise. « Si cette loi est retirée, comme il se doit, Huawei pourra apporter aux Etats-Unis des technologies plus avancées et les aider à construire les meilleurs réseaux 5G », la cinquième génération de technologie mobile, a souligné M. Guo.

« Salir l’entreprise »

Il a précisé que le groupe chinois allait demander des dommages et intérêts en raison des restrictions « inconstitutionnelles » le visant. « Le gouvernement américain ne ménage aucun effort pour salir l’entreprise », a-t-il par ailleurs dénoncé lors d’une conférence de presse organisée au siège de Huawei dans la métropole de Shenzhen (sud de la Chine). Guo Ping a également accusé les Etats-Unis d’avoir piraté des serveurs de l’entreprise et d’avoir volé courriels et codes sources.

Selon Washington, le Parti communiste au pouvoir en Chine pourrait potentiellement utiliser les équipements de Huawei afin d’espionner d’autres pays ou de perturber des communications cruciales. Les Etats-Unis ont interdit à l’entreprise, pourtant leader planétaire dans ce domaine, de participer au déploiement de la 5G sur le sol américain. Et ils poussent leurs alliés occidentaux à prendre des mesures similaires.

Huawei a lancé ces dernières semaines une intense campagne de communication pour défendre sa réputation. Et le jadis discret fondateur du groupe, Ren Zhengfei, 74 ans, est monté au créneau, accordant plusieurs interviews aux médias étrangers. L’opération séduction est montée d’un cran mercredi avec l’organisation par l’entreprise d’une visite de ses sites de production et de recherche et développement dans le sud de la Chine.

Le cas Meng Wanzhou

Dans son offensive contre Huawei, Washington entend également juger sa directrice financière, Meng Wanzhou, pour violation des sanctions contre l’Iran. Arrêtée début décembre au Canada et actuellement en liberté surveillée, c’est aussi la fille du fondateur du groupe. La prochaine comparution de Mme Meng doit avoir lieu le 8 mai à Vancouver, où elle avait été arrêtée début décembre lors d’une escale entre deux vols.

Dans la foulée, deux Canadiens avaient été interpellés en Chine, dans ce qui est largement perçu en Occident comme une mesure de représailles. Ils sont soupçonnés d’avoir mis en danger la sécurité nationale.

Huawei est le leader mondial des équipements de télécommunications. Mais sa domination suscite les inquiétudes croissantes des Etats-Unis, qui veulent rester à la pointe du secteur technologique. Ceux-ci disent s’inquiéter du fait que Pékin puisse utiliser des « backdoors », ces portes d’entrées dans les équipements permettant potentiellement d’espionner les communications.

Des inquiétudes qui trouvent leurs origines dans le passé du fondateur de Huawei – un ex-ingénieur de l’armée – et dans une loi obligeant les groupes dont le siège social est en Chine à apporter une aide technique aux services de renseignements.